10/05/2013
Etude n°7, Le peuple spécial de Dieu, Michée 6 (18 05 13)
Introduction au livre de Michée
Le Prophète dit de lui-même au v 1 qu’il est originaire d’un village de la plaine centrale de Canaan, au sud-ouest de Jérusalem. Il aurait connu les rois de Juda Jotham, Ahaz et Ezéchias, dont les règnes s’étendent d’environ 750 à 686 av JC. Son ministère, contemporain de celui d’Esaïe en Juda, et de celui d’Osée en Israël, aurait duré près de 60 ans. Son livre est donc un condensé de ses paroles.
Le contexte historique se découvre grâce aux livres des Rois et des Chroniques. Les premières prophéties de Michée annoncent la destruction de Samarie et la déportation de ses habitants en 722, dont 2 R 17 indique la cause principale, l’idolâtrie (7 et 23). Michée a dû commencer à parler pendant le siège de Samarie entre 724 et 722. Le livre de Jérémie fait allusion au sort de Michée, qui sous Ezéchias, n’avait pas été mis à mort malgré ses prophéties de destruction de Jérusalem (comme risquait de l’être Jérémie, 120 ans plus tard ). Michée avait obtenu la conversion du roi et le report du « châtiment » annoncé (Jr 26.17-19).
Deux faits importants marquent le règne d’Ezéchias : il provoqua par sa révolte contre les Assyriens vers 701, l’invasion de leurs troupes et le siège de Jérusalem (2R 18). Ecoutant les paroles de l’Eternel prononcées par Esaïe et Michée, le roi se repentit de son orgueil et l’invasion assyrienne avorta (2 R 19). Ezéchias entreprit aussi une réforme politico-religieuse, pour rétablir le service du Temple et la célébration de la Pâque à Jérusalem, après l’idolâtrie de son père Ahaz (2 Ch 29-31). Les avertissements de Michée (2 et 3, 6.9-16) furent entendus et portèrent des fruits de repentance qui éloignèrent la ruine de Jérusalem de 120 ans!
Le message de Michée est un des plus sévères de l’Ancien Testament, mais contient les plus belles promesses messianiques. Michée dénonce sévèrement toutes les formes d’idolâtrie du peuple et de ses chefs, en annonce les conséquences, mais donne aussi de merveilleuses promesses de rétablissement.
Le texte, un des plus difficiles de l’Ancien Testament, abonde en jeux de mots ou de sons absolument intraduisibles, en changements continuels de personnes, et en ironie difficilement transmissible. Il en résulte une variété considérable de traductions et d’interprétations, et une organisation du texte apparemment sans logique. On peut voir trois étapes marquées par la répétition de l’appel « Ecoutez » adressé à trois catégories d’auditeurs (peuples:1.2, chefs d’Israël:3.1, peuple de Dieu 6.1 et 3). Après des invectives puissantes, chaque partie se termine par des promesses messianiques de paix et de délivrance.
Le sens général reste clair et peut facilement être actualisé en ce temps d’attente de la venue du Seigneur : pour le recevoir sans être écrasé par son jugement, il est nécessaire de reconnaître son état devant lui, et de regarder à l’Eternel en mettant son espérance dans le Dieu de son salut (7.7).
***
« On t’a fait connaître, ô homme, ce qui est bien, et ce que l’Éternel demande de toi : c’est que tu pratiques le droit, que tu aimes la loyauté et que tu marches humblement avec ton Dieu » Mic 6.8
Observons Michée 6
Le contexte
Les chapitres 1 à 5 sont séparés en deux parties par l’invitation à écouter adressée d’abord aux peuples de la terre (1.2) puis aux chefs d’Israël (3.1). Après des invectives sévères, des promesses de restauration permettent au peuple de garder l’espoir (ch 4-5).
Le texte ch 6
A) Qui parle, et à qui ?
Qui ? L’Eternel, directement : v 3-5, 10-16.
indirectement par son prophète : v 1-2, 8-9.
Le prophète représentant le peuple : v 6-7.
A qui ? Au peuple d’Israël v 2c,
A la nature témoin v 1-2a,b.
B) Quelle scène est représentée dans le texte ? Il s’agit d’un procès v2
1 - Instruction du procès
a) interpellation aux témoins v 2
b) Rappel des bontés passées de Dieu v 3-5
c) Plaidoyer de défense de l’accusé v 6-7
d) Rappel de la Loi v 8
2- Accusations de Dieu
a') Interpellation à l’accusé v 9
c’) Transgressions de la Loi v 10-12
3- Sentence
b’) Conséquences pour l’avenir v 13-16
Les versets sont liés de façon à placer au centre la loi divine selon laquelle est jugé le peuple accusé.
C) Quels bienfaits de Dieu sont rappelés v-1 ?
- sortie d’Egypte et délivrance de la servitude
- Révélation de la Loi par Moise et les prophètes
- Protection sur la route : épisode de Balaam devant le roi de Moab (Nb 22-23)
- Entrée dans la terre promise : de Sittim située à l’Est du Jourdain à Guilgal située a l’Ouest du Jourdain (Jos 3-5).
D) Que propose l’accusé pour obtenir le pardon ?
Il propose d’apporter des dons d’humilité : sacrifices d’animaux ou humains, rites expiatoires, qui ne sont que des formalités extérieures.
E) Que lui oppose Dieu ? v 8
Le bien = Justice, miséricorde, humilité,
Intimité avec Dieu = Etat d’esprit, attitude intérieure positive.
Le mal = injustice, violence, mensonge et tromperie,
Idolâtrie (v:16, 1Rois 16) = Etat d’esprit, attitude intérieure négative.
F) Quelles sont les conséquences du péché ?
Souffrances (v13) par insatisfaction et insécurité
Destruction après honte et disgrâce.
Comprenons
On revient ici à la situation décrite à propos des chefs au ch 3. Mais dans cette 3° partie du livre, c’est le peuple tout entier qui est interpellé.
1) L’image du procès donne une idée des relations de Dieu avec
l’homme : un procès implique un dialogue entre deux personnes qui ont été liées, mais dont les relations se sont détériorées par la faute de l’une ou l’autre. Dieu ici a été abandonné par son peuple. Il le convoque pour qu’il rende compte de son attitude devant la terre entière appelée à assister au procès(Le texte grec dit plutôt « devant » que « avec » ; si on veut garder cette préposition, il faut la prendre comme signifiant « en présence de »). La présence de ce témoin indiquerait que la terre est concernée par la relation de l’homme avec Dieu. Comme dans l’Apocalypse ( 4 premières trompettes ch 8 et 4 premiers fléaux ch 16), elle subit involontairement les conséquences néfastes de la séparation de l’homme d’avec le Créateur.
Comme dans toutes les Ecritures où Dieu est sans cesse en procès avec son peuple qui a rompu son Alliance (Es 1:18), Dieu rappelle son amour pour Israël au cours de son histoire en commençant par l’événement qui a fondé le peuple, sa délivrance de l’esclavage de l’Egypte sous la conduite de Moïse et sa fratrie, puis « les actes de justice de Dieu » qui ont permis au peuple d’être protégé des desseins maléfiques du roi de Moab. Le Seigneur interroge mais n’accuse pas, comme à la Création. Il se présente comme un Dieu d’amour, plein de sollicitude pour ses créatures.
Devant ces preuves d’amour, le peuple devrait reconnaître ses torts et en demander pardon. Or nous le voyons répondre pour essayer d’amadouer Dieu.
A la sollicitude aimante de Dieu, l’homme ne semble rien comprendre : il répond comme si les preuves de la volonté divine de délivrance, de protection, de salut n’étaient pas suffisantes pour lui donner l’assurance de son pardon ; il croit pouvoir « acheter » ce pardon par des offrandes, des sacrifices et même le sacrifice de son premier-né ; les enfants de Dieu tombent dans le même péché que les païens idolâtres : ils cherchent à « apaiser » Dieu, à lui «faire plaisir» par des actes de piété extérieure, des pratiques religieuses de mortification, certes pénibles, mais qui ne transforment pas leur état d’esprit ni leur conduite.
Le prophète rappelle alors (v 8) les exigences divines de vie juste et bonne dans l’intimité de Dieu. Il ne veut pas « d’actes religieux» qui n’engagent pas la vie toute entière, et qui dispensent, dans l’esprit des hommes, d’une pratique de la justice et de la miséricorde, ou même d’une relation vraie et humble avec Dieu.
2) Cette fois, Dieu prévient clairement son peuple des conséquences de ses fautes (v 9) : il subira le même sort que Samarie à cause de ses malhonnêtetés, ses violences, ses mensonges (v 10-12).
Comme dans Gen 3:16-17, Dieu est présenté comme l’auteur des « châtiments », mais il faut comprendre que Dieu ne fait qu’annoncer ce qu’il sait devoir arriver par suite du mauvais choix de l’homme, un peu comme la mère qui prévient son enfant des dangers du feu : « tu te brûleras ! ». La menace est réelle mais elle se veut dissuasive, comme le prouve le v 9 : en « craignant le nom de l’Eternel», on peut être sage et éviter de souffrir des conséquences de sa mauvaise conduite, famine, guerre, perte du fruit de son travail, destruction, opprobre (v 13-16).
3) La sentence de Dieu n’est que le constat de la situation. L’idolâtrie, c’est à dire l’attention à d’autres conseils (v16) que ceux de Dieu, détruit toutes les relations de l’homme :
avec son environnement : la nature est atteinte aussi par la cupidité, l’amour du profit et du pouvoir de l’homme (Gen 3:16-17 ; Rom 8:19-22 ; Apoc 11:18).
avec les autres hommes : l’amour de l’argent conduit au vol, au mensonge, à la violence, à l’injustice.
avec Dieu qu’on s’imagine « satisfait», « heureux» de recevoir des dons et sacrifices qui coûtent.
Le peuple, tellement influencé par l’idolâtrie ambiante et les pratiques introduites par le roi Achab, semble ignorer ou méconnaître les leçons de son histoire avec Dieu rappelée par Michée, et les enseignements du sacrifice d’Isaac : Dieu, pour rétablir la relation du pécheur avec Lui, et lui conserver la vie, se donne Lui-même en son Fils (préfiguré par le bélier), en faveur de l’homme.
Questions pour une application dans la vie chrétienne
- Quelles preuves de l’amour de Dieu ai-je dans ma vie personnelle et dans l’histoire des relations de Dieu avec son peuple et son Eglise ? Comment les conserver en mémoire, pour ne pas douter de son amour au moment de l’épreuve ?
- Comment comprendre l’expression usuelle « faire plaisir à Dieu »? Pourquoi, par exemple, observer le Sabbat, pratiquer la réforme sanitaire, rendre sa dime et ses offrandes ?
- Que signifie pour moi et pour l’Eglise : « marcher humblement avec Dieu » ?
Donner des exemples concrets de droiture, de miséricorde et de loyauté dans la conduite du chrétien au sein de notre société contemporaine.
-Comment prendre en considération les avertissements de Dieu sur notre avenir ?
- Comment considérons-nous la souffrance ? (mérite, punition, moyen de salut, conséquence du mal sur la terre, occasion de révolte ou de retour à Dieu). Qu’est-ce que l’exemple de Christ nous enseigne à ce sujet ?
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03/05/2013
Etude n°6, Cherchant éperdument à pardonner, Jonas 3.4-10 (11 05 13)
Introduction au livre de Jonas
A cause de tous ces faits miraculeux, et de l’image négative que donne le héros de lui-même et du peuple juif, la critique moderne a contesté l’authenticité du livre et de son histoire. C’est oublier que Dieu utilise ses serviteurs les prophètes pour enseigner et corriger son peuple (2 Ti 3.16), ou avertir les nations (Jr 25.20-27), et qu’il se sert de miracles pour authentifier la révélation de sa puissance et de sa miséricorde (1 Rois 18.36-39).
La nature du livre peut être envisagée de trois façons différentes :
- c’est l’histoire réelle d’un épisode de crise de la vie du prophète en conflit avec son Dieu,
- c’est une parabole, sans appui historique, destinée à fustiger le nationalisme juif et à révéler l’universalisme de la grâce de Dieu,
- c’est un enseignement de la miséricorde divine, à partir d’un fait réel, présenté sous forme de parabole.
Le livre est placé parmi les livres prophétiques plus à cause de la mention du prophète Jonas (2 Rois 14.25) et du sens de son enseignement qu’à cause du style de l’écrit qui l’apparente aux paraboles et non aux prophéties. L’intérêt du livre réside en effet surtout dans le sens de son enseignement, que nous chercherons à découvrir peu à peu au cours du trimestre.
Le personnage du prophète est tiré de 2 Rois 14.25 où il apparaît sous le nom de Jonas, fils d’Amittaï, de Gath-Hépher, pour annoncer la parole de Dieu au roi Jéroboam II à Samarie. Ce roi impie (v 24) gouverna 40 ans (787-747 av JC) le royaume d’Israël. Malgré son impiété, Dieu bénit son long règne par pitié pour son peuple (v 26-27) à qui il tendait une dernière perche avant l’exil, pour l’amener au repentir.Ce règne fut ainsi marqué par une prospérité et une étendue territoriale extraordinaire, comme l’avait annoncé Jonas.
Dans le livre qui porte son nom, Jonas apparaît comme un nationaliste endurci, qui refuse d’entendre le message de la bonté universelle que Dieu désire lui faire comprendre à travers ses expériences personnelles.
La leçon générale du livre se révèle dans la structure littéraire : Jonas, après être passé par des périodes de refus obstiné de la volonté de Dieu (1.4-14 ; 4.1-3), par des expériences de « mort » dans la mer (2.4-6) ou sous son ricin (4.8), a enfin compris que le salut n’était qu’en Dieu (2.10), qui prenait soin non seulement de lui, le Juif rebelle, mais aussi de tous les peuples même les plus impies comme les Ninivites (4.11) lorsqu’ils crient à Dieu leur détresse et leur repentir (2.8 et 3.6-10).
Le but que Dieu se fixe en envoyant les avertissements et les appels de ses prophètes (Amos 3.7) aux Juifs comme aux impies, n’est pas de leur faire le mal prévu dans les prophéties, mais de les inciter à revenir à lui car « Dieu ne désire pas la mort du pécheur, mais qu’il se repente et qu’il vive » (Ez 33.11).
« Tu m’as fait remonter vivant du gouffre…le salut appartient à l’Éternel. »Jon 2.7, 10.
« Je savais que tu es un Dieu qui fais grâce, et qui es compatissant, lent à la colère et riche en bienveillance, et qui regrettes le mal » Jon 4.2
Observons Jonas 3.4-10
Le contexte : Jonas, dont le prénom signifie “ colombe “, fut contemporain d’Amos et de Joël et appartenait à la tribu de Zabulon, il était originaire de Gath-Hépher, bourgade de la Galilée à une heure au nord-est de Nazareth. Jonas prophétisa sous Jéroboam II, à une période de grande prospérité et de paix, tandis que la puissance Assyrienne vivait un déclin passager. Jonas, possédé par l’idée du particularisme juif, a du mal à comprendre que Dieu puisse se préoccuper du salut d’un peuple aussi cruel et lui confier la mission d’avertir des gens si corrompus. A quoi bon perdre son temps et risquer sa vie ? Jonas fuit donc dans la direction opposée à bord d’un bateau, puis au cours d’une tempête il est jeté à la mer sur sa demande ; après trois jours passés dans le ventre d’un grand poisson, il crie à l’Eternel et est miraculeusement rejeté sur la terre pour accomplir la mission que Dieu lui avait confiée.
Le texte :
4.4 Dans Ninive, Jonas marche une journée pour délivrer son message.
4.5 Les Ninivites publient un jeûne
4.6-9 Le roi l’apprend et ordonne à tout le peuple de se repentir
4.10 Dieu ne les détruit pas.
- Que signifient les signes extérieurs de deuil sur l’état d’âme des Ninivites ?
- Dans les paroles du roi, distinguer les différentes étapes du retour à Dieu ?
- Quels sentiments sont attribués à Dieu ? Que dénotent-ils sur ceux du roi ?
Comprenons
Jonas reçoit un deuxième appel de la part de Dieu et annonce à la grande ville: “encore 40 jours et Ninive sera détruite”. Son message oral était inspiré par Dieu (3.2) sans qu’on sache exactement ce que Dieu lui avait demandé de dire, mais cela fut interprété par le prophète comme une condamnation plus que comme un appel à la repentance. Dieu avait ordonné à son prophète d’aller porter sa parole de jugement à Ninive. C’était une parole très brève : crier contre sa méchanceté (1.2). La parole de Jonas est aussi courte, parole d’avertissement avec un délai. Le mot traduit par « destruction » (v 4), comme Jonas espérait le voir depuis sa hutte à l’est de la ville (4.5), signifie aussi « bouleversement », comme les Ninivites semblent l’avoir aussi compris, en bouleversant leurs attitudes, leurs sentiments, et leurs pensées par un retour à Dieu (3.8). Le prophète a la connaissance de la miséricorde de Dieu (4.2) mais n’en parle pas aux Ninivites, et ce sont eux qui curieusement comptent sur la bonté de Dieu (3.10). La participation du bétail, tout à fait irréalisable, à ces rites de repentance n’est indiquée que pour montrer l’étendue de ce mouvement vers Dieu ! Symboliquement, l’homme dans la Bible représente le croyant, opposé à la bête, qui symbolise l’incroyant (voir la mésaventure de Nébucadnetsar, transformé en « bête » à cause de son impiété, Dan 4.29). L’association des bêtes au deuil des hommes pourrait signifier que tous, religieux ou non, viennent à Dieu, pour éviter la destruction de la ville.
Jonas, comme prophète connaissait les paroles de jugement et de condamnation de Dieu contre ceux qui vivent sans lui. Dès les dix Paroles (Ex 20.5) Dieu avait affirmé qu’il ne laisserait pas impuni l’idolâtre, synonyme de méchant dans la Bible (Dt 7.9-10). Ninive à l’époque de Jonas représentait le summum de l’idolâtrie aux yeux des Israélites. Jusqu’à Jonas ces messages de jugement étaient donnés aux peuples d’Israël et de Juda, même s’ils concernaient des nations païennes, pour encourager le peuple de Dieu opprimé par ces nations. Pour la première fois, un prophète d’Israël est envoyé délivrer son message d’avertissement directement au peuple concerné ! L’intention miséricordieuse de Dieu pour ces nations étrangères et son enseignement à son peuple seront révélés à Jonas par ses expériences personnelles rapportées dans les chapitres 1-2 et 4.
Si Jonas connaissait les paroles de jugement, il n’ignorait pas non plus les paroles de miséricorde (4.2). Mais cette possibilité du pardon de Dieu pour Ninive, était à ses yeux très humiliante pour son personnage : il passerait pour un « faux prophète » puisque sa prédiction ne se réaliserait pas au bout des 40 jours annoncés. (Il n’imaginait pas que le repentir de Ninive serait très bref, ni que 40 ans plus tard Ninive serait effectivement détruite par les Babyloniens).
Le choix du bref message oral qu’il délivre dans Ninive, est révélateur de son état d’esprit, reflet de celui d’Israël à son époque envers les nations païennes. Il ne retient que la condamnation et l’espère même profondément puisque le pardon lui donne envie de mourir (4.3). Il n’a pas compris la raison du délai de 40 jours (à mettre en parallèle avec les 40 ans dans le désert du peuple hébreu, ou les 40 jours de jeûne de Jésus dans le désert), délai destiné à donner le temps nécessaire pour prendre conscience de son état devant Dieu et lui revenir complètement. Jonas est rempli des préjugés de sa propre-justice, et du privilège de faire partie du peuple élu. Refusant de reconnaître Dieu comme un Dieu d’amour envers tous les hommes, il regarde tous les autres peuples comme idolâtres, donc destinés à la destruction. Et le plus vite serait le mieux à ses yeux, pour débarrasser le monde de cette « racaille malfaisante » ! Les fruits d’un tel état d’esprit ne sont que haine, irritation, désir de mort. Est-ce ce qu’on attend d’un prophète de Dieu ?
Sa première expérience de la miséricorde de Dieu envers les marins idolâtres et repentis (1.14-16) ou envers lui-même, prophète rebelle sauvé des abîmes par un poisson (ch 2), ne lui a pas servi à comprendre la situation de Ninive. Il faudra une autre intervention de Dieu à propos d’un ricin,qui touche de près à son confort personnel (4.6-11), pour lui ouvrir les yeux et enfin lui permettre d’offrir à Dieu sa reconnaissance (2.10).
Alors que les Ninivites avaient un temple dédié à leur divinité Ishtar, le roi demande de “ crier avec force “ au Dieu de Jonas et de revenir de leur mauvaise voie ainsi que de leurs actes de violence. Etonnante réaction d’un peuple cruel et sanguinaire qui se repent si facilement à l’annonce faite par un prophète hébreu. L’expérience de Jonas était certainement connue du peuple, ce qui conféra à son message une redoutable autorité, le Christ lui-même dit “ que Jonas fut un signe pour les Ninivites ‘( Luc 11.30). Jonas a un message oral à délivrer. Mais à son insu, son histoire parle aussi du jugement de Dieu sur le prophète en fuite, réalisé par sa mise à la mer dans la tempête, et suivi du salut de Jonas rejeté vivant hors du poisson ; elle parle aussi du salut des marins repentis, qui ont dû raconter partout leur aventure miraculeuse. Cette expérience parlait de la puissance et du pardon de son Dieu. Les païens pouvaient constater « de visu » que celui qui revient à Dieu et lui obéit reçoit le pardon et la vie. Préparés par leur sentiment très religieux, voire superstitieux, par leur respect de la divination et par le récit du vécu de Jonas, les Ninivites vont entendre les paroles de jugement du prophète comme un appel à adorer son Dieu , donc à garder la vie comme Jonas. Ils vont mieux saisir que Jonas et son peuple (Mt 12.41), l’intention qu’a Dieu en leur envoyant un prophète et en leur accordant un délai : Dieu ne veut pas la mort du pécheur, mais qu’il se repente et qu’il vive (Ez 33.11) et il ne fait pas de considération de personnes (Ac 10.34-35) pour tous ceux qui croient en lui (Ac 10.43).
Le jeûne dans l’humiliation, la repentance et un changement de direction radical sont toujours le signe d’un retour vers le Dieu unique, en reconnaissant sa dépendance de Lui et en attendant la délivrance du poids du péché comme David (Ps 51) ou des ennemis, comme Esther, Mardochée et le peuple (Esther 4).
Le prophète rempli de lui-même devra apprendre (ch 4) à sonder son propre cœur pour y découvrir ses idoles : égoïsme, orgueil nationaliste, ressentiment contre Dieu et haine des autres. Il devra passer par la mort de ces sentiments négatifs et destructeurs de sa personne, puisqu’ils le conduisent à désirer mourir (4.3,8-9). Cette mort à lui-même lui permettra de comprendre tout l’amour et le pardon de Dieu pour lui (poisson, ricin, suscités par Dieu pour sa vie et son confort) et pour tous ceux qui se repentent et l’adorent, même si ce n’est pas dans les formes de la piété dont il a l’habitude.
Il est facile aujourd’hui aussi de prononcer des jugements de condamnation sur les autres qui ne croient pas ou ne pratiquent pas comme nous.
Nous sentons-nous concernés par les appels au repentir que contiennent implicitement les avertissements divins ? (Ap 8 à 9.21)
Nous pouvons comme Jonas nous retirer à l’écart pour attendre le retour de Jésus qui va balayer tous ceux qui commettent le mal et dont nous estimons ne pas faire partie. Heureusement, la miséricorde de Dieu à notre égard peut parler à notre insu, au-delà de notre attitude et de nos paroles de rejet. Combien le message serait mieux perçu si nos paroles et notre vie concouraient à annoncer la bonne nouvelle du salut, c’est-à-dire l’absence de jugement pour ceux qui se repentent et reviennent à Dieu (Jean 3.18a) ! Nous remplirions ainsi notre rôle de prophètes des derniers temps, nos fruits de repentance, de justice et d’amour permettant de nous identifier comme messagers de Dieu (Mat 7.20).
Dieu entendit la voix du peuple de Ninive, Il vit leur repentance et leur pardonna (Jo 3.10). Le texte exprime ce pardon, de façon humaine, comme si Dieu changeait d’avis envers les Ninivites. En fait son intention avait toujours été de leur offrir son pardon ! Pour leur faire entendre cette offre, il fallait seulement les interpeller de façon « musclée », les avertir par des moyens susceptibles d’être compris par des cœurs « durs d’oreilles » ! Entendons-nous les appels de Dieu à travers les événements catastrophiques de notre époque, prophétisés de longue date dans l’Apocalypse ?
Dieu veut montrer à Jonas que Ses desseins d’amour sont destinés aussi aux païens et que s’Il s’est choisi un peuple, c’est afin que celui-ci apporte aux gentils le message de repentance et de salut. Jonas ne fut pas le seul messager : Elie fut envoyé à Sarepta vers une veuve (1R 17), Elisée guérit Naaman le Syrien ( 2R. 5), Jesus va vers la samaritaine (Jn 4) et guérit la fille d’une femme grecque d’origine syro-phénicienne (Mc 7.26-30), plus tard Pierre a une vision d’une nappe (Ac 10) où Dieu lui demande de ne pas considérer comme souillé ce qu’Il déclare comme étant pur, puis Paul et les apôtres comprennent eux aussi que le message que Dieu leur a confié ne leur appartient pas mais est pour tous les hommes et toutes les nations (Mt 28.19). Dieu veut nous dire qu’au travers de tous les siècles “Sa Parole ne retourne pas â Lui sans effet, sans avoir exécuté Sa volonté et accompli Ses desseins (Es 55.11).
Par ces multiples expériences de Jonas, qui lui font découvrir l’amour inconditionnel et le pardon illimité de Dieu, Dieu nous invite à distinguer la spécificité du prophète de Dieu, qui le différencie du faux prophète selon la recommandation de Paul (1 The 5.20-21) : « Ne méprisez pas les prophéties, examinez toutes choses et retenez ce qui est bon ». Le faux prophète flatte les hommes à qui il s’adresse, pour en tirer profit, ses messages par la parole et les actes détournent de Dieu, ou donnent une fausse image de sa personne. Le vrai messager de Dieu délivre une parole souvent peu agréable à entendre, mais qui permet aux destinataires de rentrer en eux-mêmes, de prendre conscience de leur état de péché devant Dieu et de se tourner vers Dieu pour leur salut. Le témoignage de la vie du prophète de Dieu est en lui-même porteur de ce message de l’amour inconditionnel de Dieu.
Questions pour une application dans la vie chrétienne
- Quelles sont mes réactions face à l’amour inconditionnel de Dieu ? Comment éviter d’être un « fils aîné » de la parabole de Luc 15.11-32 ?
- Quels sentiments envers les autres dominent en moi ? Quels préjugés sur moi et sur les autres me faut-il abandonner ?
- Ai-je conscience que Dieu m’a confié un message pour que je le transmette, qu’Il m’en fait le dépositaire et que je n’ai pas le droit de le garder pour moi ?
- Comme adventiste du 7ème jour, quels messages ma vie et mes paroles véhiculent-ils autour de moi ? Messages de pardon, ou messages de jugement ?
- Que représente avant tout pour moi la perspective du proche retour de Christ :
la destruction du mal et de ceux qui le commettent,
la délivrance de la souffrance pour les enfants de Dieu,
la fin de ce monde sans Dieu,
le début d’une nouvelle vie avec Dieu,
une raison de craindre le jugement, ou l’assurance du salut ?
- En quoi ces visions influencent-elles mes attitudes et mes paroles vis-à-vis des autres, croyants ou incroyants, chrétiens ou non-chrétiens ?
- Pourquoi l’appel de Dieu à revenir à lui n’est -il pas entendu aujourd’hui ? Sont-ce tous ces gens étrangers à mon éducation et à ma culture qui ne sont pas prêts à entendre le dernier message que Dieu adresse à l‘humanité ? Ou est-ce moi qui ne suis pas prêt à le transmettre?
- Mon amour pour les humains est-il inspiré de celui de Dieu qui veut que « tous parviennent à la repentance et soient sauvés»? 2P.3.
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