03/05/2013
Etude n°6, Cherchant éperdument à pardonner, Jonas 3.4-10 (11 05 13)
Introduction au livre de Jonas
A cause de tous ces faits miraculeux, et de l’image négative que donne le héros de lui-même et du peuple juif, la critique moderne a contesté l’authenticité du livre et de son histoire. C’est oublier que Dieu utilise ses serviteurs les prophètes pour enseigner et corriger son peuple (2 Ti 3.16), ou avertir les nations (Jr 25.20-27), et qu’il se sert de miracles pour authentifier la révélation de sa puissance et de sa miséricorde (1 Rois 18.36-39).
La nature du livre peut être envisagée de trois façons différentes :
- c’est l’histoire réelle d’un épisode de crise de la vie du prophète en conflit avec son Dieu,
- c’est une parabole, sans appui historique, destinée à fustiger le nationalisme juif et à révéler l’universalisme de la grâce de Dieu,
- c’est un enseignement de la miséricorde divine, à partir d’un fait réel, présenté sous forme de parabole.
Le livre est placé parmi les livres prophétiques plus à cause de la mention du prophète Jonas (2 Rois 14.25) et du sens de son enseignement qu’à cause du style de l’écrit qui l’apparente aux paraboles et non aux prophéties. L’intérêt du livre réside en effet surtout dans le sens de son enseignement, que nous chercherons à découvrir peu à peu.
Le personnage du prophète est tiré de 2 Rois 14.25 où il apparaît sous le nom de Jonas, fils d’Amittaï, de Gath-Hépher, pour annoncer la parole de Dieu au roi Jéroboam II à Samarie. Ce roi impie (v 24) gouverna 40 ans (787-747 av JC) le royaume d’Israël. Malgré son impiété, Dieu bénit son long règne par pitié pour son peuple (v 26-27) à qui il tendait une dernière perche avant l’exil, pour l’amener au repentir.Ce règne fut ainsi marqué par une prospérité et une étendue territoriale extraordinaire, comme l’avait annoncé Jonas.
Dans le livre qui porte son nom, Jonas apparaît comme un nationaliste endurci, qui refuse d’entendre le message de la bonté universelle que Dieu désire lui faire comprendre à travers ses expériences personnelles.
La leçon générale du livre se révèle dans la structure littéraire : Jonas, après être passé par des périodes de refus obstiné de la volonté de Dieu (1.4-14 ; 4.1-3), par des expériences de « mort » dans la mer (2.4-6) ou sous son ricin (4.8), a enfin compris que le salut n’était qu’en Dieu (2.10), qui prenait soin non seulement de lui, le Juif rebelle, mais aussi de tous les peuples même les plus impies comme les Ninivites (4.11) lorsqu’ils crient à Dieu leur détresse et leur repentir (2.8 et 3.6-10).
Le but que Dieu se fixe en envoyant les avertissements et les appels de ses prophètes (Amos 3.7) aux Juifs comme aux impies, n’est pas de leur faire le mal prévu dans les prophéties, mais de les inciter à revenir à lui car « Dieu ne désire pas la mort du pécheur, mais qu’il se repente et qu’il vive » (Ez 33.11).
« Tu m’as fait remonter vivant du gouffre…le salut appartient à l’Éternel. »Jon 2.7, 10.
« Je savais que tu es un Dieu qui fais grâce, et qui es compatissant, lent à la colère et riche en bienveillance, et qui regrettes le mal » Jon 4.2
Observons Jonas 3.4-10
Le contexte : Jonas, dont le prénom signifie “ colombe “, fut contemporain d’Amos et de Joël et appartenait à la tribu de Zabulon, il était originaire de Gath-Hépher, bourgade de la Galilée à une heure au nord-est de Nazareth. Jonas prophétisa sous Jéroboam II, à une période de grande prospérité et de paix, tandis que la puissance Assyrienne vivait un déclin passager. Jonas, possédé par l’idée du particularisme juif, a du mal à comprendre que Dieu puisse se préoccuper du salut d’un peuple aussi cruel et lui confier la mission d’avertir des gens si corrompus. A quoi bon perdre son temps et risquer sa vie ? Jonas fuit donc dans la direction opposée à bord d’un bateau, puis au cours d’une tempête il est jeté à la mer sur sa demande ; après trois jours passés dans le ventre d’un grand poisson, il crie à l’Eternel et est miraculeusement rejeté sur la terre pour accomplir la mission que Dieu lui avait confiée.
Le texte :
4.4 Dans Ninive, Jonas marche une journée pour délivrer son message.
4.5 Les Ninivites publient un jeûne
4.6-9 Le roi l’apprend et ordonne à tout le peuple de se repentir
4.10 Dieu ne les détruit pas.
- Que signifient les signes extérieurs de deuil sur l’état d’âme des Ninivites ?
- Dans les paroles du roi, distinguer les différentes étapes du retour à Dieu ?
- Quels sentiments sont attribués à Dieu ? Que dénotent-ils sur ceux du roi ?
Comprenons
Jonas reçoit un deuxième appel de la part de Dieu et annonce à la grande ville: “encore 40 jours et Ninive sera détruite”. Son message oral était inspiré par Dieu (3.2) sans qu’on sache exactement ce que Dieu lui avait demandé de dire, mais cela fut interprété par le prophète comme une condamnation plus que comme un appel à la repentance. Dieu avait ordonné à son prophète d’aller porter sa parole de jugement à Ninive. C’était une parole très brève : crier contre sa méchanceté (1.2). La parole de Jonas est aussi courte, parole d’avertissement avec un délai. Le mot traduit par « destruction » (v 4), comme Jonas espérait le voir depuis sa hutte à l’est de la ville (4.5), signifie aussi « bouleversement », comme les Ninivites semblent l’avoir aussi compris, en bouleversant leurs attitudes, leurs sentiments, et leurs pensées par un retour à Dieu (3.8). Le prophète a la connaissance de la miséricorde de Dieu (4.2) mais n’en parle pas aux Ninivites, et ce sont eux qui curieusement comptent sur la bonté de Dieu (3.10). La participation du bétail, tout à fait irréalisable, à ces rites de repentance n’est indiquée que pour montrer l’étendue de ce mouvement vers Dieu ! Symboliquement, l’homme dans la Bible représente le croyant, opposé à la bête, qui symbolise l’incroyant (voir la mésaventure de Nébucadnetsar, transformé en « bête » à cause de son impiété, Dan 4.29). L’association des bêtes au deuil des hommes pourrait signifier que tous, religieux ou non, viennent à Dieu, pour éviter la destruction de la ville.
Jonas, comme prophète connaissait les paroles de jugement et de condamnation de Dieu contre ceux qui vivent sans lui. Dès les dix Paroles (Ex 20.5) Dieu avait affirmé qu’il ne laisserait pas impuni l’idolâtre, synonyme de méchant dans la Bible (Dt 7.9-10). Ninive à l’époque de Jonas représentait le summum de l’idolâtrie aux yeux des Israélites. Jusqu’à Jonas ces messages de jugement étaient donnés aux peuples d’Israël et de Juda, même s’ils concernaient des nations païennes, pour encourager le peuple de Dieu opprimé par ces nations. Pour la première fois, un prophète d’Israël est envoyé délivrer son message d’avertissement directement au peuple concerné ! L’intention miséricordieuse de Dieu pour ces nations étrangères et son enseignement à son peuple seront révélés à Jonas par ses expériences personnelles rapportées dans les chapitres 1-2 et 4.
Si Jonas connaissait les paroles de jugement, il n’ignorait pas non plus les paroles de miséricorde (4.2). Mais cette possibilité du pardon de Dieu pour Ninive, était à ses yeux très humiliante pour son personnage : il passerait pour un « faux prophète » puisque sa prédiction ne se réaliserait pas au bout des 40 jours annoncés. (Il n’imaginait pas que le repentir de Ninive serait très bref, ni que 40 ans plus tard Ninive serait effectivement détruite par les Babyloniens).
Le choix du bref message oral qu’il délivre dans Ninive, est révélateur de son état d’esprit, reflet de celui d’Israël à son époque envers les nations païennes. Il ne retient que la condamnation et l’espère même profondément puisque le pardon lui donne envie de mourir (4.3). Il n’a pas compris la raison du délai de 40 jours (à mettre en parallèle avec les 40 ans dans le désert du peuple hébreu, ou les 40 jours de jeûne de Jésus dans le désert), délai destiné à donner le temps nécessaire pour prendre conscience de son état devant Dieu et lui revenir complètement. Jonas est rempli des préjugés de sa propre-justice, et du privilège de faire partie du peuple élu. Refusant de reconnaître Dieu comme un Dieu d’amour envers tous les hommes, il regarde tous les autres peuples comme idolâtres, donc destinés à la destruction. Et le plus vite serait le mieux à ses yeux, pour débarrasser le monde de cette « racaille malfaisante » ! Les fruits d’un tel état d’esprit ne sont que haine, irritation, désir de mort. Est-ce ce qu’on attend d’un prophète de Dieu ?
Sa première expérience de la miséricorde de Dieu envers les marins idolâtres et repentis (1.14-16) ou envers lui-même, prophète rebelle sauvé des abîmes par un poisson (ch 2), ne lui a pas servi à comprendre la situation de Ninive. Il faudra une autre intervention de Dieu à propos d’un ricin, qui touche de près à son confort personnel (4.6-11), pour lui ouvrir les yeux et enfin lui permettre d’offrir à Dieu sa reconnaissance (2.10).
Alors que les Ninivites avaient un temple dédié à leur divinité Ishtar, le roi demande de “ crier avec force “ au Dieu de Jonas et de revenir de leur mauvaise voie ainsi que de leurs actes de violence. Etonnante réaction d’un peuple cruel et sanguinaire qui se repent si facilement à l’annonce faite par un prophète hébreu. L’expérience de Jonas était certainement connue du peuple, ce qui conféra à son message une redoutable autorité, le Christ lui-même dit “ que Jonas fut un signe pour les Ninivites" ( Luc 11.30). Jonas a un message oral à délivrer. Mais à son insu, son histoire parle aussi du jugement de Dieu sur le prophète en fuite, réalisé par sa mise à la mer dans la tempête, et suivi du salut de Jonas rejeté vivant hors du poisson ; elle parle aussi du salut des marins repentis, qui ont dû raconter partout leur aventure miraculeuse. Cette expérience parlait de la puissance et du pardon de son Dieu. Les païens pouvaient constater « de visu » que celui qui revient à Dieu et lui obéit reçoit le pardon et la vie. Préparés par leur sentiment très religieux, voire superstitieux, par leur respect de la divination et par le récit du vécu de Jonas, les Ninivites vont entendre les paroles de jugement du prophète comme un appel à adorer son Dieu, donc à garder la vie comme Jonas. Ils vont mieux saisir que Jonas et son peuple (Mt 12.41), l’intention qu’a Dieu en leur envoyant un prophète et en leur accordant un délai : Dieu ne veut pas la mort du pécheur, mais qu’il se repente et qu’il vive (Ez 33.11) et il ne fait pas de considération de personnes (Ac 10.34-35) pour tous ceux qui croient en lui (Ac 10.43).
Le jeûne dans l’humiliation, la repentance et un changement de direction radical sont toujours le signe d’un retour vers le Dieu unique, en reconnaissant sa dépendance de Lui et en attendant la délivrance du poids du péché comme David (Ps 51) ou des ennemis, comme Esther, Mardochée et le peuple (Esther 4).
Le prophète rempli de lui-même devra apprendre (ch 4) à sonder son propre cœur pour y découvrir ses idoles : égoïsme, orgueil nationaliste, ressentiment contre Dieu et haine des autres. Il devra passer par la mort de ces sentiments négatifs et destructeurs de sa personne, puisqu’ils le conduisent à désirer mourir (4.3,8-9). Cette mort à lui-même lui permettra de comprendre tout l’amour et le pardon de Dieu pour lui (poisson, ricin, suscités par Dieu pour sa vie et son confort) et pour tous ceux qui se repentent et l’adorent, même si ce n’est pas dans les formes de la piété dont il a l’habitude.
Il est facile aujourd’hui aussi de prononcer des jugements de condamnation sur les autres qui ne croient pas ou ne pratiquent pas comme nous.
Nous sentons-nous concernés par les appels au repentir que contiennent implicitement les avertissements divins ? (Ap 8 à 9.21)
Nous pouvons comme Jonas nous retirer à l’écart pour attendre le retour de Jésus qui va balayer tous ceux qui commettent le mal et dont nous estimons ne pas faire partie. Heureusement, la miséricorde de Dieu à notre égard peut parler à notre insu, au-delà de notre attitude et de nos paroles de rejet. Combien le message serait mieux perçu si nos paroles et notre vie concouraient à annoncer la bonne nouvelle du salut, c’est-à-dire l’absence de jugement pour ceux qui se repentent et reviennent à Dieu (Jean 3.18a) ! Nous remplirions ainsi notre rôle de prophètes des derniers temps, nos fruits de repentance, de justice et d’amour permettant de nous identifier comme messagers de Dieu (Mat 7.20).
Dieu entendit la voix du peuple de Ninive, Il vit leur repentance et leur pardonna (Jo 3.10). Le texte exprime ce pardon, de façon humaine, comme si Dieu changeait d’avis envers les Ninivites. En fait son intention avait toujours été de leur offrir son pardon ! Pour leur faire entendre cette offre, il fallait seulement les interpeller de façon « musclée », les avertir par des moyens susceptibles d’être compris par des cœurs « durs d’oreilles » ! Entendons-nous les appels de Dieu à travers les événements catastrophiques de notre époque, prophétisés de longue date dans l’Apocalypse ?
Dieu veut montrer à Jonas que Ses desseins d’amour sont destinés aussi aux païens et que s’Il s’est choisi un peuple, c’est afin que celui-ci apporte aux gentils le message de repentance et de salut. Jonas ne fut pas le seul messager envoyé à l'étranger : Elie fut envoyé à Sarepta vers une veuve (1R 17), Elisée guérit Naaman le Syrien ( 2R. 5), Jesus va vers la samaritaine (Jn 4) et guérit la fille d’une femme grecque d’origine syro-phénicienne (Mc 7.26-30), plus tard Pierre a une vision d’une nappe (Ac 10) où Dieu lui demande de ne pas considérer comme souillé ce qu’Il déclare comme étant pur, puis Paul et les apôtres comprennent eux aussi que le message que Dieu leur a confié ne leur appartient pas mais est pour tous les hommes et toutes les nations (Mt 28.19). Dieu veut nous dire qu’au travers de tous les siècles “Sa Parole ne retourne
pas â Lui sans effet, sans avoir exécuté Sa volonté et accompli Ses desseins
(Es 55.11)
Par ces multiples expériences de Jonas, qui lui font découvrir l’amour inconditionnel et le pardon illimité de Dieu, Dieu nous invite à distinguer la spécificité du prophète de Dieu, qui le différencie du faux prophète selon la recommandation de Paul (1 The 5.20-21) : « Ne méprisez pas les prophéties, examinez toutes choses et retenez ce qui est bon ». Le faux prophète flatte les hommes à qui il s’adresse, pour en tirer profit, ses messages par la parole et les actes détournent de Dieu, ou donnent une fausse image de sa personne. Le vrai messager de Dieu délivre une parole souvent peu agréable à entendre, mais qui permet aux destinataires de rentrer en eux-mêmes, de prendre conscience de leur état de péché devant Dieu et de se tourner vers Dieu pour leur salut. Le témoignage de la vie du prophète de Dieu est en lui-même porteur de ce message de l’amour inconditionnel de Dieu.
Questions pour une application dans la vie chrétienne
- Quelles sont mes réactions face à l’amour inconditionnel de Dieu ? Comment éviter d’être un « fils aîné » de la parabole de Luc 15.11-32 ?
- Quels sentiments envers les autres dominent en moi ? Quels préjugés sur moi et sur les autres me faut-il abandonner ?
- Ai-je conscience que Dieu m’a confié un message pour que je le transmette, qu’Il m’en fait le dépositaire et que je n’ai pas le droit de le garder pour moi ?
- Comme adventiste du 7ème jour, quels messages ma vie et mes paroles véhiculent-ils autour de moi ? Messages de pardon, ou messages de jugement ?
- Que représente avant tout pour moi la perspective du proche retour de Christ :
la destruction du mal et de ceux qui le commettent,
la délivrance de la souffrance pour les enfants de Dieu,
la fin de ce monde sans Dieu,
le début d’une nouvelle vie avec Dieu,
une raison de craindre le jugement, ou l’assurance du salut ?
En quoi ces visions influencent-elles mes attitudes et mes paroles vis-à-vis des autres, croyants ou incroyants, chrétiens ou non-chrétiens ?
- Pourquoi l’appel de Dieu à revenir à lui n’est -il pas entendu aujourd’hui ? Sont-ce tous ces gens étrangers à mon éducation et à ma culture qui ne sont pas prêts à entendre le dernier message que Dieu adresse à l‘humanité ? Ou est-ce moi qui ne suis pas prêt à le transmettre, ou qui le transmets à la manière de Jonas ?
- Mon amour pour les humains est-il celui de Dieu qui veut que « tous parviennent à la repentance et soient sauvés»? 2Pi 3.9
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26/04/2013
Etude n°5 : Cherchez l’Éternel et vivez, Amos 5.1-17 (04 05 13)
« Recherchez le bien et non le mal afin que vous viviez, et qu’ainsi l’Éternel des armées soit avec vous, comme vous le dites. » Am 5.14
Observons Amos 5.1-17
Le contexte : Amos vient de dénoncer l’endurcissement d’Israël, et d’avertir le peuple de la proximité de la rencontre avec le Créateur, et de la nécessité de s’y préparer.
Le texte est construit en parallèles concentriques (= chiasme)
a) 1-2 : Complainte sur la ruine d’Israël
b) 3-7 : Avertissements de l’Éternel
c) 8-13 : Puissance du Créateur qui juge les injustices en Israël
b’)14-15 : Appel de Dieu
a’)16-17 : Lamentations au passage de l’Éternel
Au centre des lamentations et des appels de Dieu, se trouve le jugement de Dieu sur son peuple pécheur.
Quelles injonctions de Dieu sont répétées avec insistance ?
De quelles explications sont-elles immédiatement suivies ? en quoi éclairent-elles l’appel de Dieu ?
Quelle est la situation spirituelle et sociale d’Israël ?
Quel espoir est laissé à Israël ?
Comprenons
a) Dans les deux premiers versets de ce chapitre, le prophète Amos prononce par anticipation une complainte sur la ruine certaine d’Israël. Cette ruine totale ne peut être évitée puisque les avertissements précédents (4.6-13) n’ont eu aucun effet.
La vierge d’Israël est le nom donné au peuple pour lui rappeler qu’il était destiné à s’unir avec Dieu, mais que cette union n’a pu se réaliser car le peuple, s’étant livré à l’idolâtrie, est tombé dans la boue. L’image de la vierge couchée à terre, évoque la prostitution sacrée qui accompagnait les cultes idolâtres. De la pureté spirituelle d’origine, le peuple est tombé dans la dépravation spirituelle et morale.
b,b’) La ruine s’annonce par la diminution de la puissance militaire du pays dont Israël s’enorgueillissait sous Jéroboam II. Le message d’Amos ne doit pas être facile à entendre par une population plongée dans la prospérité et l’orgueil national. L’appel du Seigneur à le chercher et à vivre retentit par trois fois pour insister sur l’urgence de changer d’objectif. Le verbe "chercher, rechercher" ne s’applique pas à la recherche fébrile d’un objet perdu, mais signifie plutôt « consulter, entrer en contact, fréquenter » une personne. Par deux fois (v 4,6), le verbe hébreu « chercher » est au mode inaccompli, pour signifier une durée ou une répétition de l’action ; il est suivi du verbe "vivre" à l’impératif. Mais la troisième fois, les modes sont inversés (v 14) : l’ordre porte maintenant sur la rechercher du bien, qui a pour conséquence ou pour but la Vie de l’homme dans la présence de Dieu. Dieu désire et ordonne que l’homme vive, et il en donne les moyens. Au projet du Seigneur doit répondre l’adhésion de l’homme et sa recherche persévérante de la présence de son Dieu. Le projet divin englobe la vie présente sur terre et la vie éternelle avec Lui.
Au verset 14, nous avons une allusion claire au récit de la Création, qui a été préparée par la présentation de Dieu comme le créateur tout puissant (v 8-9).Dès la Création, Dieu a placé l’homme devant le même choix de vie ou de mort, symbolisé par la présence des deux arbres au milieu du Jardin d’Eden. Soit l’homme se nourrissait de l’Arbre de Vie, et restait en communion avec Dieu, soit il optait pour la satisfaction de ses passions, délaissant Dieu et décidant par lui-même de ce qui est bien ou mal. La recherche du Bien est mise en parallèle avec la recherche de l’Éternel (v 4,6,14). Dieu est le Bien (tov en hébreu), comme Jésus le rappelle au jeune homme riche (Mat 19.16 ; Ps 25.8), et ce qu’Il fait est bon (tov) pour l’humain (Gen 1). C’est pourquoi rechercher la présence de ce Dieu Vivant et Bon, ne peut être que bénéfique. Pourtant Israël, comme Adam et Eve, s’est détourné de l’Éternel, ce qui est appelé « le mal » (v 14-15). Il a cru adorer l’Éternel en le représentant par des veaux d’or, ou en sacralisant des lieux historiques parce qu’ils avaient été le théâtre d’interventions divines. A Béthel (Gen 28.18), Jacob avait eu la vision de l’échelle et avait consacré une stèle commémorative en appelant le lieu « Maison de Dieu ». Le peuple du royaume du nord, privé du temple de Jérusalem dans le royaume du sud, avait établi à Béthel un culte idolâtre, croyant de bonne foi, comme les Hébreux dans le désert, que le veau d’or représentait l’Eternel (Ex 32.4-5). A Guilgal (Jos 4 et 5), situé entre le Jourdain et Jéricho, avaient eu lieu la première circoncision et la première Pâque en Canaan. Israël y pratiquait un culte commémoratif. Beer CHéba étonne ici, car il est situé en Juda. Dieu y était venu à la rencontre d’Agar (Gen 21. 14), et était ensuite apparu à Jacob qui y avait offert des sacrifices avant son dernier départ vers l’Egypte (Gen 46.1). Ce lieu historique était devenu une occasion de chute par sa sacralisation idolâtre. Cette mention d’un « lieu saint » de Juda était-elle destinée à avertir aussi le royaume du sud pour lui éviter le même sort qu’Israël ? Ou bien exagérait-elle volontairement la piété formaliste du royaume du nord, qui pensait plaire à Dieu en multipliant pèlerinages et commémorations rituelles (Am 5.21-23), tout en négligeant « le droit et la justice » dans la vie sociale (v 10-12, 24) ?
c) Amos rappelle que l’Éternel est le créateur pour insister sur sa toute puissance : il a créé les lois de l’univers pour favoriser la vie de l’homme, mais peut tout aussi bien les bouleverser, et donc abattre les puissants de ce monde qui se croient intouchables (v 9). Il est le Maître de la nature et de l’histoire humaine (Dan 2.21). Il est donc aussi le juge qui connaît les iniquités de son peuple.
Les trois répétitions de l’expression « à la porte » (v 10,12,15), donnent au texte une forte connotation de jugement. C’est en effet à la porte des villes que les anciens siégeaient pour juger les affaires courantes de la cité, et rendre justice aux opprimés et aux innocents accusés à tort (Jos 20.4 ; Ruth 4.1-2 ; 2 Sam 15.2 ; 1 Rois 22.10 ; Pr 1.20-21 ; et… Ap 4.1-2 !). Or en Israël, sous Jéroboam II, les juges bafouaient le droit et la justice, maintenant la population dans l’oppression ou la pauvreté pour mieux la réduire au silence et la dominer (v 7,12, 13), tandis que les puissants vivaient dans l’opulence, le mensonge, la corruption, refusant toute critique qui dénonçait la vérité (v 10). Ces accents indignés d’Amos, se retrouvent à un autre siècle chez l’apôtre Jacques (ch 2), et pourraient s’adapter à notre époque !
L’Éternel avertit que ces péchés contre autrui auront leurs conséquences directes selon la loi biblique « Tu récolteras ce que tu sèmes », ou « on vous jugera comme vous aurez jugé » (Mat 7.2 ; Gal 6.7).
a’) Comparé à un feu dévorant (v 6), l’Éternel juge, tout puissant, pourrait apparaître sans pitié pour son peuple coupable d’idolâtrie et d’injustices, qui se croyait à l’abri de son jugement parce qu’il était le peuple « élu ». Amos avertit Israël que le jugement-condamnation, considéré comme réservé aux nations impies, tombera aussi sur lui. Mais il laisse pour le « reste de Joseph » qui écouterait sa Parole (v 15b), une voie ouverte à la miséricorde et au pardon de Dieu lorsqu’ "il passera parmi eux". Joseph dont sont issues les deux tribus principales d’Israël, Ephraïm et Manassé, est, par toute son histoire dans la Genèse (ch 37 à 50), le « type » de Jésus-Christ. Le « reste de Joseph » peut désigner la fraction du peuple des croyants en Jésus-Christ, qui accepte d’écouter la voix de Dieu et suit ses enseignements. Ce Reste, qu’il ne nous est pas permis de désigner nous-mêmes (qui sommes-nous pour en juger ?) subsistera lorsque le Seigneur « passera au milieu » du peuple. Le verbe se réfère au « passage » de l’Ange exterminateur de la Pâque à la dixième plaie d’Egypte. Ceux qui avaient marqué leurs portes du sang de l’agneau pascal furent épargnés de la mort de leurs premiers-nés. Symbole très parlant de la miséricorde et du pardon de Dieu pour ceux qui se réclament du sacrifice de Jésus-Christ, « l’Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde ». Ils peuvent avoir l’assurance de la vie éternelle (Jean 3.16-18). Le salut est donc toujours possible, mais ce « passage de l’Éternel », à son retour en gloire, par-dessus les repentants, provoquera les lamentations générales des endurcis (v 16-17a).
Questions pour une application dans la vie chrétienne
- Comment chercher l’Éternel aujourd’hui ? Est-ce une démarche spirituelle, et /ou concrète ?
- « Vivez » nous ordonne le Seigneur ! Cet ordre concerne-t-il le présent terrestre ou le futur éternel ? Qu’est-ce qui peut dans le texte expliquer notre réponse, dans un cas comme dans l’autre ? A quoi cela nous invite-t-il dans l’exercice de notre piété ?
- En quoi la dénonciation du formalisme de la piété peut-elle s’appliquer à notre dénomination ? Comment ne pas tomber dans l’idolâtrie de la mémoire de nos pionniers, de leurs lieux de résidence ou de leur mode de vie ? Quelle différence y a-t-il entre respect et vénération de nos traditions ?
- Comment vivons-nous notre religion (voir Michée 6.8) ?
- Attendons-nous le « passage » de notre Dieu comme un jugement-condamnation des autres, impies ou infidèles, ou un jugement libérateur, rendant justice aux opprimés, persécutés, et fidèles, parmi lesquels nous nous considérons ? A quels comportements une telle conception nous conduit-elle ? Comment les éviter ?
- Comment être le « reste de Joseph », objet de la miséricorde de Dieu ?
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