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21/03/2014

Etude n°13 : Le prix d’être disciple, Luc 14.25-35 (29 03 14)

 

« Notre espérance à votre égard est ferme, car nous le savons : comme vous avez part aux souffrances, vous avez part aussi à la consolation » 2 Cor 1.7

 

Observons

Le contexte : Depuis le chapitre 9, Jésus est en marche pour la dernière fois vers Jérusalem, où il donnera sa vie et ressuscitera. En chemin, il enseigne ceux qui le suivent, par des instructions et des paraboles. Notre texte se situe à peu près au milieu de cet enseignement, avant l’entrée à Jérusalem (ch 19).

Le ch 14 a commencé avec la guérison d’un malade le jour du Sabbat, qui a permis à Jésus de confondre les docteurs de la Loi et les Pharisiens qui y assistaient. Le repas pris chez un des chefs religieux est l’occasion pour Jésus de rappeler la loi d’humilité de son royaume (v 7-14), et l’extension universelle de l’invitation au repas du Maître, à la suite du refus des premiers invités (v 15-24). Jésus avertit alors la foule des conditions d’entrée dans la marche à sa suite.Cordée d'alpinisme.jpg

 

Le texte s’organise autour de deux paraboles :

1-     v 25-27 : Comment devenir disciple de Jésus

2-     v 28-32 : Deux paraboles sur l’importance de la prévoyance

3-     v 33-35 : L’importance du rôle du disciple.

Comment les versets 27 et 33 qui  encadrent les deux paraboles orientent-elles leur sens ?(répétitions, parallélisme entre croix et renoncement)

 

Comprenons

La montée à Jérusalem pour célébrer la Pâque était l’occasion de rencontres nombreuses parmi les pèlerins enthousiastes. Jésus profite de ces instants pour avertir la foule trop facilement et superficiellement entraînée à le suivre. Devenir son disciple n’est pas une décision à prendre à la légère !

 

1- Comment devenir disciple : Jésus emploie à dessein des expressions sévères et exagérées pour frapper l’attention des auditeurs.

V 26 : Nous ne pouvons pas donner au verbe « haïr » le sens premier de « détester » comme un ennemi, qui rendrait l’injonction de Jésus en complet désaccord avec son enseignement de l’amour même des ennemis (Mt 5.44), ou avec le 5ème commandement : « tu honoreras ton père et ta mère » (Ex 20.12). Le verbe « haïr » est employé ici dans le sens de « aimer moins », par opposition avec « aimer plus, préférer », la langue araméenne, que parlait Jésus, ne possédant pas cette nuance. Jésus veut dire que celui qui vient à lui doit l’aimer plus que sa famille, plus que sa propre vie (Mt 16.25 ; Luc 9.24), comme les martyrs « qui n’ont pas aimé leur vie au point de craindre la mort » (Ap 12.11). Jésus doit avoir la priorité sur toutes les affections de son disciple.

V 27 : L’image de la croix avait déjà été employée après la profession de foi de Pierre (Luc 9.23), en parallèle avec le renoncement à soi. La croix n’est pas ici le symbole du fardeau, de la souffrance physique ou morale, que l’on porte dans l’épreuve. Elle représente plutôt l’abandon total de sa volonté propre, sur laquelle nous dirions qu’il faut « faire une croix » !

Suivre Jésus demande un renoncement, douloureux certes, à l’indépendance, à « l’auto décision » de ce qui est bien ou mal, telles que les choisit l’homme naturel, d’Adam à nos jours. Ce renoncement à soi ne signifie pas la perte de sa personnalité comme d’aucuns le craindraient. Chacun garde personnalité, tempérament, histoire et culture, mais se soumet volontairement et par amour à la volonté divine et à l’action régénératrice et transformatrice de son Esprit, confiant dans la promesse que « Dieu fait tout concourir au bien de ceux qui l’aiment » (Rm 8.28).

Jésus a eu cette attitude toute sa vie, jusque dans son supplice à la croix. En tant qu’être humain, il a renoncé à utiliser son pouvoir divin à son profit (voir ses tentations au désert) et à sa volonté de vivre pour lui-même (voir Géthsémané). Sur la croix, il a accepté de mettre à mort la nature humaine coupée de Dieu qu’il avait accepté d’endosser, pour revêtir pleinement la nature divine à la résurrection, ouvrant ainsi le chemin de la vie éternelle à tous ses disciples.

Porter sa croix et suivre Jésus, c’est donc accepter de faire mourir en soi « les actions de la chair » non régénérée, pour vivre et être conduit par Lui comme un fils de Dieu (Rm 8.13-14).

 

2- Deux paraboles

La décision de suivre Jésus n’est pas à prendre à la légère car il y va de la crédibilité du disciple (v 29) ou même de sa vie (v 31). Jésus le fait entendre par deux paraboles, celle du bâtisseur de tour, et celle du roi en guerre.Thessalonique remparts.jpg

a)     De même que le bâtisseur ne se lance pas dans sa construction de tour sans avoir examiné l’état de ses finances pour la mener à terme et éviter déshonneur et moqueries, de même celui qui veut construire sa vie comme disciple de Jésus, doit savoir ce qu’il lui en « coûtera » en engagement de sa personne et en persévérance, pour ne pas devenir une cause d’ironie sur l’Evangile, ou même de blasphème contre Dieu, de la part des incroyants, comme Nathan le reprocha à David après son crime et son adultère avec Betsabé (2 Sa 12.14).

b)     La parabole du roi qui part en guerre contre un ennemi plus puissant présente l’engagement avec Jésus de façon paradoxale. Le roi fort de ses dix mille soldats serait une image de « l’homme naturel » qui compte sur ses propres forces, sur sa propre volonté, et qui lutte contre Dieu pour les conserver. On pense à la lutte de Jacob avec l’Ange au gué de Jabbok (Gn 32.25-33). Quand il se rend compte de son impuissance et de la supériorité des forces de celui contre lequel il lutte en le considérant comme un ennemi, il abandonne toute prétention, et se soumet pour rester en vie et en paix. D’ennemi l’autre roi devient alors son allié ! De même pour suivre Jésus, l’homme naturel doit « renoncer à tout ce qu’il possède » (v 33), c’est-à-dire sa prétention à être libre et autonome, son orgueil et sa vanité ; il passe  alors par les conditions de paix avec Dieu que Jésus a remplies lui-même parfaitement durant sa vie terrestre : humilité devant Dieu et obéissance à sa volonté.

 3- L’importance du disciple (Illustration : cristaux de sel en coupe)cristaux sel naturels.jpg

Une dernière comparaison avec le sel donne à la foule le sens du rôle de disciple. Cette image a été utilisée par Jésus dans un autre contexte (Mt 5.13), dans le Sermon sur la Montagne, juste après l’énoncé des lois du Royaume qu’on a l’habitude de nommer les Béatitudes. Le disciple devient le sel spirituel de la terre, conservant sa vie spirituelle, empêchant sa corruption et donnant une saveur exceptionnelle à l’existence terrestre par sa simple présence au monde et son lien avec le Prince de la Vie. Mais si le disciple se laisse influencer par les intérêts terrestres de son naturel, il perd sa fonction de sel, et n’a plus aucune utilité dans le monde. Son sort est pire qu’avant, comme dans la parabole de la maison nettoyée mais laissée vide, où s’établissent des esprits encore plus mauvais que les premiers occupants (Mt 12.43-45).

V 35b : La dernière injonction de Jésus à ses auditeurs veut attirer leur attention sur l’importance de ses derniers enseignements. On ne devient pas disciple de Jésus sur un coup de tête enthousiasmé, ni superficiellement. Suivre Jésus engage la vie entière du disciple et lui donne une grande responsabilité vis-à-vis du monde qui l’entoure. En devenant son disciple, il devient son représentant là où il vit, et son témoignage y porte des fruits en l’honneur de Dieu ou pas.

 

Ce passage qui insiste sur la responsabilité de l’homme dans ses choix de vie et sur le renoncement à soi du disciple est heureusement suivi des paraboles de la brebis, de la drachme perdues et du fils prodigue, qui mettent en lumière la puissance de la grâce et de l’amour de Dieu, sans qui le disciple ne pourrait persévérer ni garder sa saveur et sa fonction de « sel » de la terre.

 

Questions pour une application dans la vie chrétienne

 

-          Qu’est-ce qui est prioritaire pour moi et pour mon église ? Cela vient-il en conflit avec les exigences ou l’exemple de Jésus ? En quoi devons-nous modifier notre échelle de priorités pour mettre Jésus à la première place dans notre vie ?

 

-          Que signifie pour moi être disciple de Jésus ? Soyons honnêtes avec nous-même et envisageons cette question dans tous les domaines d’application : social, familial, professionnel, amical, ecclésial, spirituel !

 

-          A quoi suis-je amené à renoncer si je veux être le sel bienfaisant de la terre, sans brûler ni devenir fade ?

 

-          Quels engagements puis-je prendre dans ma marche avec Jésus et avec l’aide de son Esprit ?

14/03/2014

Etude n°12 : La moisson et les moissonneurs Mt 9.35-10.15 (22 03 14)

 

Mon Père est glorifié en ceci : que vous portiez beaucoup de fruit, et vous serez mes disciples » Jean 15.8

 

Observons Mat 9.35-10.15moisson.jpg

Le contexte

Le « Sermon sur la Montagne » (ch 5-7), premier discours où Matthieu a placé les enseignements de Jésus sur les principes de son Royaume, a été suivi du récit de plusieurs guérisons qui illustrent le ministère de salut de Christ (ch 8-9.34). A la fin du chapitre 9 (35-37), Jésus manifeste sa compassion pour son peuple sans berger, et appelle ses disciples à prier pour que le Seigneur suscite des ouvriers pour sa moisson. Matthieu introduit ainsi le second discours de son Évangile, où il réunit les instructions précises de Jésus à ses « envoyés », données à divers moments de son ministère en Galilée. (voir Luc 9 et 10)

 

Le texte : Mt 9.35-10.15

9.35 : En quoi consiste l’œuvre de Christ  en Galilée ? Où va-t-il  et que fait-il ?

9.36 Quel sentiment éprouve-t-il ? Quel est l’état spirituel du peuple ? A quoi est-il comparé ?

9.37-38 : Quel mot revient trois fois  et à quelle place ? Quel autre mot est répété deux fois ? Quel ordre est donné aux disciples ?

10.1 : Quel pouvoir est donné par Jésus aux douze disciples ? Quel rapport y a-t-il entre ce choix et les deux versets précédents ?

10.2-5 : Noms des douze : Dans quel ordre sont-ils présentés ?

10. 6-15 : Leur mission :

            v 6 : Quel est  leur champ d’action ?

            v 7-8a : Quelle est leur action ?

            v 8b-10 :  Quelles sont les caractéristiques économiques de leur action ?

            v 11-15 : Quelles doivent être leurs réactions à l’accueil qui leur sera fait ?

 

 

Comprenons

Matthieu résume dans les v 35-36, l’activité du Sauveur, comme il l’avait déjà fait en 4.23. Il y rajoute au v 36, le sentiment de compassion éprouvé par Jésus devant la fatigue et l’abattement, plus spirituels que physiques de son peuple livré à lui-même. La comparaison du peuple avec un troupeau de brebis est classique et reprend les textes de l’AT  qui l’emploient aussi (Nb 27.17 ; ES 53.6 ; Mi 2.12 ; Jér 50.6).

L’amour de Jésus pour son peuple misérable lui fait désirer son entrée dans le Royaume, qu’il compare à la moisson. Pour cela il a besoin de serviteurs qui en montrent le chemin et prépare les cœurs à l’accueillir.

Les miracles de Jésus qui précèdent chez Matthieu l’appel des Douze, ont pour but de révéler l’amour, la compassion de Jésus pour ses frères humains, et de les conduire d’une guérison physique à une guérison spirituelle, par la découverte de la puissance libératrice du Sauveur. Les aveugles dont les yeux s’ouvrent au toucher de Jésus, symbolisent l’aveuglement spirituel du peuple, plongé dans l’obscurité par méconnaissance de l’amour de Dieu (Os 4.6a). Comme eux, le peuple aspire à la lumière sans trouver de guide pour y accéder. Leur guérison et celle du possédé de mutisme révèlent à tous que seul Jésus peut délivrer des chaînes de l’Adversaire. Le désir de Jésus de trouver des aides pour cette œuvre de libération a pour conséquence le choix des douze apôtres et leur ordre de mission, que Matthieu rapporte au ch 10. A la prédication du Royaume, ils auront à joindre une œuvre de guérison physique et morale, image de la guérison spirituelle que le Sauveur désire pour son peuple (10.7-8).

 

Les instructions sur la mission

Jésus a appelé déjà la plupart des Douze à le suivre en devenant ses disciples (4.18-23 et 9.9). Maintenant une étape nouvelle semble franchie : parmi tous ses disciples, il en envoie douze dans une mission dont il précise les modalités. Le mot « apôtre » signifie « envoyé ». On donnait ce nom chez les Juifs aux hommes de confiance qui transmettaient les circulaires des chefs de synagogue, recueillaient les offrandes, et soutenaient la foi et le zèle des communautés de la « diaspora » juive en Méditerranée. On retrouve ce nom d’ « envoyé » pour les frères chargés de la collecte des offrandes pour l’Église de Judée (2 Co 8.23), ainsi que pour Epaphrodite, envoyé de l’Église de Philippes pour subvenir aux besoins de Paul (Phi 2.25 ; 4.18).

Dans notre texte, Jésus nomme ainsi douze hommes tirés de ses disciples, qui occuperont parmi eux une place importante et reconnue de tous, car c’est sur leur seul témoignage que repose la foi de l’Église (Ep 2.20 ; Ap 21.14).

 

Les noms des apôtres sont présentés en trois groupes de quatre noms, liés deux à deux par la coordination « et ».appel de Pierre et André.jpg

 V2 : Pierre est le premier nommé, à la tête du premier groupe comprenant son frère André et les deux fils de Zébédée, tous quatre appelés de la première heure à suivre Jésus. Pierre sera aussi le premier à porter la Bonne Nouvelle aux Juifs (Ac 2), puis aux païens (Ac 10). Cette primauté chronologique ne signifie pas une quelconque primauté d’autorité hiérarchique  au sein du groupe, car au Concile de Jérusalem on le voit sur le même rang que Paul face à Jacques, le frère de Jésus et le chef de l’Église de Judée sans être un apôtre, auteur présumé de l’épître qui porte son nom. Simon reçut son nom grec de Pierre, de la bouche même de Jésus pour signifier, par un jeu de mot courant à l’époque, à la fois le « roc » de sa foi, et la fragilité de sa nature, versatile comme « la pierre qui roule » (Mt 16.17-18).

Des deux fils de Zébédée, Jacques et Jean, l’un fut mis à mort par Hérode (Ac 12.2), premier martyr Jean tête.jpgparmi les apôtres ; l’autre, appelé le disciple bien-aimé dans l’évangile de Jean, écrivit ce quatrième évangile, peut-être les trois épîtres qui portent son nom, et surtout l’Apocalypse. Ces trois apôtres font partie du cercle restreint des amis intimes de Jésus, témoins privilégiés de la Transfiguration et de Géthsémané.

 V 3a : André et Philippe ont des noms grecs sans qu’on connaisse leurs noms hébreux. Ils viennent de la même ville de Betsaïda en Galilée(Jn 1.44). Ce Philippe n’est pas à confondre avec le diacre qui baptisera l’Éthiopien. C’est l’apôtre qui appela Nathanaël (Jn 1.45) sans doute le même homme que le Barthelémy de notre liste, qui lui est joint.

Thomas est désigné en grec par Didyme « le jumeau ». Il s’est fait remarquer par son pragmatisme incrédule (Jean 11.16 ; 20.24-25) puis par sa confession de foi émerveillée devant le Christ ressuscité (Jn 20.28).

Matthieu se place dans cette liste juste après Thomas et avec une grande humilité se désigne par le « péager », ce qui à son époque était une injure, stigmatisant la « mauvaise vie » de ces hommes travaillant à recueillir les impôts pour les Romains, et prélevant pour eux-mêmes une part excessive sur ces impôts.

V 3b : Jacques, fils d’Alphée est le premier du troisième groupe de quatre noms d’apôtres. C’est lui qu’on a surnommé « le Mineur » ou « le Petit » (Marc 15.40) sans doute pour sa petite taille, ou pour sonrôle effacé parmi les autres apôtres.

Thaddée, second nom de Lebbée « l’homme de cœur », selon certains manuscrits, manque dans les listes de Luc (6.16 et Ac 1.13) qui le remplace par Jude, fils de Jacques, dont parle Jean 14.22.

Simon le Cananite ou le Zélote selon Luc (6.15 et Ac 1.13) est lié ici à Judas, lui aussi zélote, c’est-à-dire faisant partie du groupe politico-religieux des révolutionnaires qui défendaient fanatiquement (Kana = zélé) les privilèges religieux et nationaux des Juifs.

Iscariot signifie soit « l’homme de Kariot », soit « le sicaire », celui qui porte un couteau, selon l’habitude des Zélotes. Tous les évangiles placent Judas en dernier avec la mention « celui qui livra Jésus ». Il sera remplacé d’abord par tirage au sort dans l’Église par Matthias (Ac 1.26), puis, directement par appel divin, par Paul (Ac 9.15) (Mosaïque : portrait traditionnel de Paul)Paul tête.jpg

 

Jésus choisit douze apôtres comme fondateurs de son Église, en parallèle aux douze patriarches, fondateurs des douze tribus d’Israël. Ainsi le peuple de Dieu est-il symbolisé par ce chiffre de 12, dont le carré 144 (12x12) multiplié par 1000 (nombre de la multitude innombrable) sera pour Jean le symbole de la plénitude infinie du peuple des rachetés de tous les temps (Ap 7 et 14).

 

Instructions sur la mission des apôtres

Les ordres de Jésus concernent ici la première mission temporaire des apôtres du vivant de Jésus avant sa résurrection et la Pentecôte. Au-delà de ces circonstances, ils sont encore en partie valables à travers les siècles.

- Le champ d’action : A ce moment du ministère terrestre de Jésus, les Douze devaient s’en tenir à la prédication du salut au seul peuple d’Israël (Mt 15.24 ; Jn 4.22) même si Jésus n’a pas hésité en certaines occasions à passer outre à ce principe (Mt 8.5-13), sachant que plus tard le salut serait annoncé à toutes les nations (Mt 24.14). Pour les disciples il était encore trop tôt. Le Saint-Esprit de la Pentecôte n’avait pas encore balayé leurs préjugés nationalistes et religieux, qui les faisaient considérer les païens et les Samaritains comme « impurs » rituellement, avec qui il fallait se garder soigneusement de tout contact, pour ne pas devenir soi-même impur ! Entre Juifs et Samaritains existaient une haine et un mépris séculaires, depuis le retour des Juifs en 536 av JC, de l’exil à Babylone. Les Samaritains étaient composés des juifs restés en Samarie après la chute du royaume du Nord en 722, et des colons implantés par les Assyriens vainqueurs, pour remplacer les dix tribus d’Israël exilées. Ces colons étaient arrivés avec leurs coutumes et leurs dieux, et avaient créé un culte syncrétique intégrant la Thora d’Israël à leurs pratiques idolâtres. Ce syncrétisme provoqua le mépris et le rejet des Juifs revenus d’exil, qui craignaient un retour à l’idolâtrie considérée comme la cause de la chute de Jérusalem et de l’exil en Babylonie (Esd 9.7 ; Né 9.26, 29). Les Juifs refusèrent l’aide militaire et politique proposée par les Samaritains, et allèrent jusqu’à renvoyer les femmes samaritaines qu’ils avaient épousées, pour ne pas risquer d’être entraînés par elles à l’idolâtrie !(Esd 9 et Né 13.23 et sq). Il s’en suivit évidemment une haine tenace des Samaritains contre les Juifs. On comprend que pour briser ce fossé entre les deux peuples, il faille du temps et l’action puissante de l’Esprit : même après la Pentecôte, les apôtres mirent  des années à accepter le salut universel (Ac 10 et 15 ; 8.5-7).

En Israël Jésus précise que seule les « brebis perdues » pourront recevoir la prédication des apôtres. Cette image empruntée aux prophètes (Es 53.6 ; Jér 50.6 ; Ez 34.5-6) décrit l’état dans lequel Jésus voit son peuple (Mt 8.36) et qui provoque sa compassion.

L’action : La prédication des apôtres doit porter sur la venue du royaume en la personne de Jésus, Dieu incarné parmi les hommes. Pour appuyer cette prédication et en faire comprendre aux Juifs attachés au concret toute la profondeur spirituelle du message, les disciples reçoivent des dons de guérison, de résurrection, de purification et de délivrance physique, psychique et spirituelle. Jésus leur délègue son autorité sur les démons et les maladies (v 7). Comment prouver leurs dires sinon par des actes concrets de libération qui révèlent le fondement de son Royaume ?

Les Douze conservèrent ces dons pour l’édification de l’Église, à une époque où ces miracles étaient aussitôt attribués à la puissance de Dieu (Ac 3 ; 9.34-42). De tels miracles aujourd’hui restent rares et discrets, car ils provoquent plus d’incrédulité et de railleries que de foi de la part de populations athées et prétendument « scientifiques ». Toutefois, spirituellement la bonne Nouvelle du salut opère dans les cœurs réceptifs de telles libérations du mal.

Jésus établit le principe de la gratuité des dons que reçoivent et partagent les prédicateurs (8b). Ils ne peuvent vendre leurs services ou leurs miracles (Ac 8.18-23) ni en faire une source de profit personnel : ils deviendraient ainsi de simples « guérisseurs », et dévalueraient la puissance divine.

Pourtant Jésus atténue aussitôt cet ordre en recommandant aux prédicateurs de dépendre pour leur vie matérielle des salaires que la communauté des croyants leur doit comme ouvriers de la Parole (1 Co 9.13-14 ; 1 Ti 5.17-18).

Confiants en Dieu et soutenus financièrement par les croyants au moyen  des dîmes de leurs revenus (dont c’est la destination première (Lév 27.30 ; Mal 3.10), qu’ils rendent en geste de reconnaissance pour les bienfaits de Dieu (Gen 14.20), les prédicateurs peuvent se consacrer entièrement à leur ministère de propagation de la Bonne Nouvelle.

La coutume de l’hospitalité, sacrée en Orient devait permettre aux apôtres d’être accueillis facilement. Toutefois il semble que Jésus leur demande de s’assurer de la « dignité » de leurs hôtes. Comment évaluer cette dignité ? Jésus leur demande-t-il de vérifier l’honorabilité des mœurs, la bonne réputation sociale de leurs hôtes ?  Ou d’estimer leur désir et leur capacité à écouter et recevoir leur message ? Quand on se rappelle comment Jésus n’hésitait pas à entrer dans les maisons des gens considérés comme « de mauvaise vie » tels les péagers, et à partager le pain avec eux et avec des prostituées, on peut pencher plutôt vers cette dernière interprétation de la dignité des hôtes. Jésus ne se place pas sur le registre de la morale, mais sur celui de la relation spirituelle et de la soif de Dieu qui peut habiter même les hommes non religieux. Cela demande aux prédicateurs le discernement de l’Esprit pour ne pas « jeter leurs perles aux pourceaux » (Mt 7.6), c'est-à-dire  ne pas prêcher en vain à des personnes qui dédaignent leur message.moissonneur.jpg

Prêcher la Parole demande patience et persévérance, d’où la nécessité pour les apôtres de ne pas s’éparpiller d’hôtes en hôtes, et de rester à demeure chez celui qui les reçoit volontiers, pour accomplir auprès de lui un travail en profondeur qui portera des fruits de paix (v 13). Si l’hôte ne les écoute pas, qu’ils ne se découragent pas ou ne s’impatientent pas : la paix de leur cœur demeurera en eux car ils ne sont pas responsables du refus de leurs auditeurs d’accepter la Bonne Nouvelle qu’ils leur apportaient. C’est le sens du geste de secouer la « poussière de leurs pieds ». La poussière, symbole de la mort (Gen 3.19) que les hôtes ont choisie spirituellement par leur rejet de la Bonne Nouvelle, ne les « souillera »pas, leur mort ne leur sera pas reprochée devant Dieu au jour du Jugement. Pour Jésus ce refus d’entendre la Parole des apôtres est plus grave que le refus des habitants de Sodome et Gomorrhe d’entendre l’appel de Lot et des anges de Dieu à sortir de leurs villes. Car pour eux ce n’étaient qu’un appel à éviter une mort physique, tandis que pour les auditeurs des apôtres c’est le refus de la vie spirituelle et éternelle qu’ils leur offrent. Sodome et Gomorrhe deviennent ainsi un « type » du sort éternel que choisissent ceux qui refusent d’écouter les appels de Dieu.

 

Questions pour une application dans la vie chrétienne

 

-  Comme les Douze, tout disciple est un « envoyé » de son Maître auprès des autres. Comment moi qui me dis un disciple de Jésus, est-ce que je remplis cette mission auprès des miens qui n’ont pas encore connu l’amour de Christ pour eux ?

 

-          Comment montrer concrètement que le royaume de Dieu s’est approché d’eux ? Qu’est-ce que cela signifie pour l’homme moderne, laïc, stressé, revendicateur, individualiste et démocrate ?

 

-          Ai-je fait l’expérience de la guérison, de la résurrection, de la libération qu’offre Jésus dans tous les domaines de ma vie ? Puis-je en révéler les effets concrets ? Si non, comment puis-je prêcher la Bonne Nouvelle aux autres, si pour moi-même elle n’a rien changé dans ma vie ?

 

-          Cette question est à se poser individuellement et collectivement. Comment l’Eglise peut-elle prêcher ce qu’elle n’est pas capable de vivre ? Que devons-nous et pouvons-nous modifier dans nos mentalités et dans nos comportements entre disciples pour rendre notre témoignage crédible à l’extérieur ?

 

-          A qui et comment puis-je témoigner de ma foi cette semaine ?