01/05/2015
Étude n°6 La femme dans le ministère de Jésus, Luc 7. 36-50 (09 05 15)
Étude n°6 La femme dans le ministère de Jésus, Luc 7. 36-50 (09 05 15)
« Vous êtes tous fils de Dieu par la foi en Christ…Il n’y a plus ni Juif ni Grec, ni esclave ni libre, ni homme ni femme, car vous tous, vous êtes un en Christ-Jésus. » Galates 3.26, 28 (Mosaïque de Monreale, Sicile : l’onction de Béthanie)
Observons
V 36-39 : Quels sont les personnes de ce récit ? Quelles sont leurs attitudes respectives ? Comment la femme est-elle mise en valeur ?
- Qu’a d’audacieux le geste de cette femme ? Que prouve-t-il sur son état d’esprit ?
- Qu’est-ce qui choque le Pharisien ? Qui accuse-t-il ?
V 40-43 : - Comment Jésus s’y prend-il pour amener le Pharisien à réfléchir et à donner lui-même son propre jugement ?
- Que révèle la parabole sur l’amour de Dieu et la reconnaissance des hommes ?
V 44-47 :- Par quelles oppositions Jésus fait-il comprendre à Simon la leçon de sa parabole ?
- Comment comprendre le verset 47 à la lumière des versets 42-43 ? Quelle différence y aurait-il entre un « parce que » et un « puisque » dans cette phrase ?
V 48-50 : Pourquoi Jésus réaffirme-t-il son pardon à la femme ?
- Quelle réaction cela provoque-t-il chez les témoins ?
- Que révèle la parole finale de Jésus sur la quête intérieure de la femme, et la compassion de Jésus envers elle ?
Comprenons
Deux jours avant la Pâque, à Béthanie, a lieu un évènement prémonitoire de la mort de Jésus. Simon le pharisien lépreux (Mat 26.6 ; Marc 14.3), sans doute précédemment guéri par Jésus, le reçoit à sa table où se trouve présente la famille que Jésus aimait. La femme anonyme dont parlent les trois premiers évangiles est en effet appelée Marie, sœur de Lazare, par Jean (12.3). Depuis longtemps (Luc 10) elle avait accepté Jésus comme roi de sa vie, et en ces jours qu’elle pressent comme les derniers, (elle a sans doute longuement médité les paroles de Jésus annonçant sa fin toute proche) elle vient lui offrir ce qu’elle a de plus précieux, en reconnaissance du pardon obtenu (Luc 7.36) et de l’amour manifesté dans la résurrection de son frère. Le repas à Béthanie a lieu en présence de Lazare ressuscité, témoin vivant de la puissance et de l’amour du Sauveur. Marie est cette jeune femme qui avait choisi d’écouter Jésus plutôt que de l’accueillir selon les conventions sociales de l’hospitalité de son époque. Marie avait cherché de tout son cœur la relation avec Jésus et elle va manifester la joie et la reconnaissance qu’elle éprouve pour lui, en lui offrant ce qu’elle a de plus précieux : un parfum de grand prix.
Le parfum de nard venait d’Inde par les caravanes et coûtait fort cher, surtout quand il était pur, authentique, non mêlé à d’autres essences. Contenu dans un vase d’albâtre, il était donc un cadeau précieux. Pour Marie, c’était symboliquement le don de son cœur et de sa vie purifiés et valorisés par Jésus. Elle ne regardait à rien d’autre que l’élan d’amour qui la portait vers celui qui lui avait manifesté tant d’attention et de compassion, malgré son état de pécheresse.
Elle accomplit envers Jésus un geste d’hospitalité que les serviteurs du maître de maison accomplissaient pour honorer un hôte de marque : on lui offrait de l’huile odorante pour ses cheveux et de l’eau pour laver ses pieds. Marie accomplit les deux gestes d’oindre la tête et les pieds (Mat 26.7, 12) avec le même parfum, si généreusement répandu qu’elle doit utiliser ses cheveux pour essuyer les pieds de Jésus. Pour elle rien ne compte plus que cet amour qu’elle partage avec Jésus.
Dans les deux premiers évangiles, devant les critiques terre-à-terre et méprisantes de quelques-uns sur ce gaspillage apparent, Jésus réhabilite le geste de Marie, se souciant de sa peine. Les esprits chagrins et matérialistes des disciples et de Judas en particulier, ne le comprennent pas, car ce mépris du coût du parfum est à leurs yeux une folie et un gaspillage inutile (Mat 26.8-9).
Pour Jésus, au contraire, ce geste est une manifestation suprême des sentiments de Marie à son égard, une illustration de la consécration de la vie de Marie à celui qu’elle aime par-dessus tout. En même temps son geste embaume son entourage, comme la joie du salut rejaillit sur l’entourage de celui qui le découvre et le répand.
En outre Jésus distingue le sens spirituel de ce don qui lui est fait comme roi et sauveur, et le sépare de la charité faite aux pauvres : on peut être charitable envers les déshérités, sans pour autant avoir donné son cœur au Christ, alors que c’est ce don-là qui est le plus important.
Enfin Jésus voit dans ce geste un signe prophétique de son embaumement, donc de sa mort. Jésus lisait dans les cœurs et a exprimé tout haut l’intuition (féminine ?) dont Marie n’avait peut-être pas conscience elle-même (Mat 26.12 ; Marc 14.8). Marie se rendra d’ailleurs réellement au tombeau pour embaumer le corps de Jésus après la crucifixion, au matin de Pâques.
Le récit de Luc oppose plus nettement la femme à Simon le pharisien : tous deux ont agi sans tenir compte des conventions. L’un n’a pas accompli les gestes usuels d’hospitalité, l’autre les a accomplis en brisant le tabou de sa condition de femme pécheresse qui lui interdisait d’approcher les « religieux ». L’un a manifesté indifférence à l’égard de Jésus et mépris à l’égard de la femme, l’autre a révélé son amour profond pour Jésus, sa reconnaissance envers le pardon qu’elle avait trouvé auprès de lui, et le don total et confiant de sa personne et de son existence (le parfum aurait pu lui assurer un avenir matériel sans souci).
L’intervention inopinée de cette femme dans la maison de Simon devient pour Simon un test de l’identité prophétique de Jésus. Alors qu’il s’interroge sur ses capacités de prophète, qui doit deviner la personnalité de ses interlocuteurs, Jésus lui manifeste qu’il connaît le fond de son cœur ! Très pédagogiquement par une petite parabole, il l’amène à prononcer un jugement sur lui-même : celui qui a été gracié de plus de fautes manifeste plus d’amour envers son sauveur ! Jésus sous-entend ainsi qu’il a reconnu la situation de ses deux interlocuteurs, sans accuser directement ni l’un ni l’autre ! Toutefois, pour que Simon comprenne mieux, Jésus fait le parallèle entre les actes de Simon et de la pécheresse, pour valoriser cette dernière. Elle a agi ainsi, non pour se faire pardonner (il aurait fallu utiliser un « parce que », faisant de l’amour la condition du pardon), mais pour manifester sa reconnaissance et son amour à suite du pardon qu’elle avait obtenu de Jésus. Ses actes prouvent cet amour et la paix qui l’habitent. On pourrait plagier le v 47 ainsi : « Puisque tu vois qu’elle aime beaucoup, c’est qu’elle a conscience d’avoir été beaucoup pardonnée ». C’est une leçon à ce Pharisien au cœur sec, qui s’étonnait de la « méconnaissance » de Jésus à propos de cette femme méprisable à ses yeux. Il n’avait peut-être pas fait de lien entre sa guérison de la lèpre et le pardon offert pour ses péchés, puisqu’il ne se croyait pas pécheur ! Non seulement Jésus connaissait très bien le cœur humble et rempli d’amour de cette femme, mais il sondait aussi celui de Simon, et remettait à leur juste place toutes les femmes mal considérées dans la société ; la réhabilitation de Marie devant tous, par l’affirmation de son pardon (Luc 7.48, 50) et du souvenir qu’elle laissera dans tous les siècles (Marc 14.9 ; Mat 26.13) révèle combien Jésus accordait de valeur aux femmes quelles qu’elles soient. Elles lui permettaient de montrer concrètement les dimensions de l’amour inconditionnel et de la grâce de Dieu, le Père de toutes ses créatures humaines.
La question des convives paraît curieuse : ils s’interrogent sur l’autorité de Jésus à « pardonner même les péchés » ! Les hommes ne peuvent se pardonner que leurs erreurs ou vexations mutuelles, mais seul Dieu peut pardonner les péchés qui coupent la relation avec Lui ! Jésus se prétendrait-il être comme Dieu ?
Jésus connaît leurs pensées et réitère sa déclaration de pardon, pour leur donner une réponse implicite : c’est à eux de se positionner face à Jésus et de décider qui ils voient en lui !
Questions pour une application dans la vie chrétienne
- Savons-nous comme Marie, suivre notre intuition spirituelle qui nous pousse vers le Seigneur, pour lui offrir notre être tout entier en reconnaissance de l’amour qu’il nous témoigne ?
- Notre reconnaissance et le don de nous-mêmes au Seigneur se manifestent-ils autour de nous par un « parfum de bonne odeur », une démonstration concrète de la joie, de la paix et de l’amour, que nous avons trouvés dans la présence et le pardon de Dieu ?
- De quel œil regardons-nous ceux qui répandent ce parfum ? Un œil critique, ironique, méprisant, envieux, ou un œil admiratif et désireux de partager et d’imiter ?
- Quelle place est faite à la femme dans l’institution et les ministères de notre Église ? Quels préjugés culturels et sociaux (place de la femme dans le mariage et la famille, dans les ministères de la Parole, la consécration au pastorat, par exemple) demeurent encore en son sein sous différents faux prétextes théologiques ? Sans tomber dans les excès du féminisme agressif, comment remédier à cet état de fait déjà au sein de mon église locale ?
08:00 Publié dans Evangile de Luc | Lien permanent | Commentaires (2)