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15/07/2022

Étude n°4 Contempler le visage de l’orfèvre  Matthieu 25.1-12 (23 07 22)

Étude n°4 Contempler le visage de l’orfèvre  Matthieu 25.1-12 (23 07 22)

(Illustration : P. Cornelius, début 19è : l’accueil par l’Epoux des vierges sages)Dix vierges Peter vonCornelius début 19è001.jpg

"Nous tous qui le visage découvert, reflétons comme un miroir la gloire du Seigneur, nous sommes transformés en la même image, de gloire en gloire, comme par le Seigneur l'Esprit". 2 Cor 3.19

 Observons

Le contexte

A quelle autre parabole fait suite celle des dix vierges ? (Mat 24.45-51) Que cherche Jésus par ces récits ?

Structure du texte

25.1-5 : Caractéristiques des dix vierges attendant l’époux.

      6-9 : Séparation des dix vierges à l’annonce de l’arrivée de l’époux.

      10  : Arrivée de l’époux, et accueil des vierges sages dans la salle des noces.

      11-12 : Rejet des vierges folles

      13 : Exhortation à veillervierges_sages_et_folles codex byzantin.jpg

-   Quelle épreuve frappe ces dix femmes et avec quels résultats ? En quoi consiste la sagesse des unes et la folie des autres ?

- Qu'est-ce qui peut choquer dans la réponse des sages à la demande des folles ? v 9. Quelle leçon en tirer ?

Pourquoi les folles ne sont-elles pas connues de l'époux, v 12 ? A quoi devons-nous veiller ?

Comprenons

Le contexte : Le dernier discours de Jésus, situé dans l’évangile de Matthieu juste avant le récit de la passion, se termine avec plusieurs paraboles (les dix vierges, les talents, le jugement des nations), en appui d’exhortations à la vigilance jusqu’au retour de Christ (24.36-44). Ces paraboles sont introduites par celle des deux serviteurs (24.45-51) et avertissent le peuple d'Israël du jugement qui sanctionnera ses actes, ou ses choix de vie. Le jugement des nations ne concerne pas le peuple des croyants, serviteurs de Dieu, mais tous les autres hommes, qui  choisissent ou non d'écouter la voix de leur cœur sans savoir que c'est celle de Dieu.

Le texte

Les jeunes filles de cette parabole puisée dans la coutume des noces orientales, sont dans l’attente de l’arrivée nocturne de l’époux. Symboliquement, elles représentent tous ceux qui se réclament de l’alliance avec Christ, et attendent son retour qui conclura ses Noces avec eux. Les jeunes filles représentent donc individuellement chaque chrétien, et collectivement l’Église, épouse du Christ (Ep 5.25-27).

Le temps de l’attente constitue en lui-même une épreuve de la foi et de la patience des chrétiens. Plongés dans l’obscurité (= l’aveuglement spirituel) du monde, les chrétiens sont munis de la lampe de la Parole de Dieu (Ps 119.105) qui les éclaire sur le but de cette attente, sur les signes de la venue du Seigneur et sur les attitudes à avoir pendant ce temps dont la durée est imprécise.

La sagesse des cinq jeunes « sages » consiste à s’être munies de réserves supplémentaires d’huile  pour leurs lampes déjà remplies : elles ont prévu une longue durée d’attente, pendant laquelle l’huile, symbole biblique du Saint-Esprit, sera nécessaire pour les éclairer et les guider!

Toutes les jeunes filles ont une lampe, tous les chrétiens ont une bible, mais tous ne la considère ni ne la fréquente pas de la même façon. Les « sages » entretiennent une relation fidèle avec elle, ils cherchent avec assiduité l’aide du Saint-Esprit pour la comprendre et la vivre pratiquement. Ils ne se contentent pas d’une approche superficielle ou intellectuelle extérieure à leur vie. Comment peut-on faire des réserves de Saint-Esprit ? Le verset 12 de la parabole peut nous fournir une piste de compréhension. Christ dit aux jeunes folles qu’il « ne les connaît pas» !  Le verbe « connaître » désigne dans la Bible l’expérience personnelle de l’amour entre époux, c’est-à-dire spirituellement la communion intime du croyant avec Christ. Les vierges folles n’avaient que l’apparence de la foi, elles possédaient peut-être le savoir biblique, mais ne cultivaient pas une relation personnelle et profonde avec Christ.

L’épreuve de l’attente semble user la patience de toutes ces jeunes filles qui s’endorment (v 5). Leur zèle se relâche, leur certitude de la proximité du retour s’affaiblit, et peut-être même disparaît. La durée est donc une véritable épreuve pour la foi : elle va révéler la profondeur de la relation que l’on a avec Dieu.

Seconde épreuve pour ces jeunes filles : l’annonce de l’arrivée imminente de l’époux, au moment où on ne s’y attend plus. Historiquement, c’est ce qu’ont vécu les chrétiens du 19ème siècle, avec tous les mouvements de Réveil, le Millérisme et l’Adventisme, qui redécouvrirent dans les Écritures cette promesse du Retour de Christ oubliée depuis des siècles. (Illustration : Cathédrale de Strasbourg, les Vierges sages et l’époux)vierges sages et époux.jpg

Dans la parabole, le cri de minuit réveille en effet les jeunes filles qui se saisissent de leurs lampes et découvrent leur état de préparation. Les sages dont la relation avec Dieu est restée vivante, même si l’espoir du retour proche de Jésus disparaissait, ravivent leur lecture et leur pratique de la Parole ; leur sagesse vient de « l’intelligence », de la compréhension par l’Esprit de la Parole, et de la pratique et l’enseignement de la justice qu’elles en tirent (voir Daniel 12.3) : par leurs paroles et leurs actes, par leur caractère transformé, épuré, elles reflètent autour d’elles les qualités de Dieu que l’on nomme les fruits de l’Esprit (Galates 5.22). C’est ainsi que leur expérience peut être illustrée par l’histoire de l’orfèvre (voir le titre de cette étude) : à la question qu’on lui posait sur la durée et le but de la purification de l’or par le feu dans un creuset, l’orfèvre répondit : "l’or est  épuré jusqu’à ce que, et pour que, on puisse y voir se refléter ma face" !

Dans notre réalité, la prise de conscience de la proximité du retour de Christ devient une épreuve de notre foi, et nous révèle  notre responsabilité personnelle dans la préparation spirituelle à ce retour, et dans la mission que nous avons auprès des autres de témoigner de l’amour de Christ (Daniel 12.3).

Au verset 9 de la parabole, les jeunes « sages » peuvent apparaître comme de parfaites égoïstes qui refusent de partager et d’aider leurs compagnes à être prêtes. En fait, il ne faut pas pousser l’interprétation de tous les détails d’une parabole. Ce genre littéraire est utilisé pour faire comprendre  de façon générale un enseignement important et simple. Le refus des jeunes filles cherche à signifier que l’on ne peut avoir de relation avec Christ par personne interposée aussi « saintes » soient-elles (les marchands d’huile, ou les jeunes filles sages). Une relation superficielle, épisodique ou négligente avec Christ, durant la vie terrestre, ne permet pas une vraie rencontre avec Lui et ne donne pas l’assurance du salut  (Mat 7.21). D’autre part aucune autre recherche philosophique, religieuse ou spirituelle, symbolisée par les marchands, ne peut garantir l’entrée dans le Royaume de Dieu (Actes 4.12).

La fermeture de la porte rappelle ce qui se passa au déluge (Ge 7.16), où la porte de l’arche fut fermée par Dieu après l’entrée des animaux et de la famille de Noé, sept jours avant la destruction du monde pécheur. Ici la porte est fermée après la venue de l’époux et l’entrée dans le Royaume des vierges sages, pour insister sur l’impossibilité totale de seconde chance de conversion après le retour du Christ. Le choix de la vie éternelle est au présent (Ps 95.7 ; Hé 3.7, 15 ; 4.7).( Cathédrale de Strasbourg, les vierges folles et le tentateur)Vierges folles Strasbourg.jpg

L’épreuve de l’attente, puis celles de l’obscurité ambiante et de l’annonce de l’arrivée de l’époux ont opéré un tri parmi le peuple de Dieu, une épuration (Daniel 12.10), un « jugement » ou une révélation :  d’un côté ceux qui  sont remplis de l’Esprit et qui rayonnent de l’amour de Christ, et de l’autre ceux dont la foi n’est que façade fragile, sans fondements solides (voir la parabole des deux maisons (Luc 6.47-49). 

Questions pour une application dans la vie chrétienne

  • Quelle place tient dans ma vie et celle de mon église l’attente du retour de Christ ? Comment cette attente influence-t-elle mes choix et mes engagements ? En quoi est-elle éprouvante pour ma foi ?
  • Comment la Parole de Dieu modifie-t-elle mes pensées et mes actions ? Comment lui accorder plus d’intérêt et d’influence sur la transformation de mon caractère ?
  • Où en est ma relation personnelle avec Dieu ? Par quoi en manifester la réalité et la qualité autour de moi ?
  • Comment mon église et moi-même pouvons-nous être des lumières dans notre entourage immédiat, révélant la « face » de notre Sauveur, véritable orfèvre de notre caractère et de notre vie ?
  • De quoi ma foi et mon caractère ont-ils besoin d’être épurés pour refléter l’image de mon Sauveur et Seigneur ?

 

ANNEXE : Texte choisi par l’UFB pour « A l’Ecoute du Texte (AET)

Ephésiens 4.11-16

Observons

Le contexte

Les trois premiers chapitres de la lettre aux Éphésiens exposent la doctrine prêchée par Paul, de l’unité en Christ entre les croyants d’origine païenne et ceux d’origine juive. Il résume cette doctrine au début du chapitre 4 (1-10) : l’unité est fondée sur la foi en un seul Dieu, un seul Seigneur, un seul Esprit qui accorde à tous ses dons pour que se crée l’unité dans la diversité.

Le texte

a) v 11 : Dons divers à l’Église concernant l’enseignement de la Parole

b) v 12 : Objectifs de ces dons : - le perfectionnement des saints

                                                          - l’édification du corps du Christ

c) v 13-14 : Buts : l’unité de la foi et de la connaissance, la maturité spirituelle opposée à l’immaturité

  b’)- v 15 : Moyen de la croissance en Christ : professer la vérité avec amour

  a’)- v 16 : Résultats : croissance harmonieuse et adaptée à chacun, dans l’amour.

 La construction hébraïque du parallélisme concentrique met en valeur au centre les buts de l’enseignement de la parole dans l’Église.

 Comprenons

L’unité prêchée (v 3) par Paul dans une église préoccupée par la cohabitation de membres issus de cultures et de foi différentes et même opposées, n’est possible que par l’action de la grâce (v 7) accordée par l’Esprit, depuis que Christ après sa résurrection a retrouvé sa puissance divine (8.10).

v 11 : les dons énumérés concernent tous l’enseignement de la Parole qui n’est pas nommée dans le texte sinon au v 15 « proclamant la vérité avec amour ».

Les apôtres (sauf Paul appelé plus tard) avaient accompagné Jésus dans son ministère terrestre. Appelés par lui, témoins de sa résurrection, ils prêchaient l’Évangile sur lequel ils fondaient les Églises (2.20).

Les prophètes ont le don de parler de la part de Dieu. Parfois ils prédisaient l’avenir, mais pas systématiquement (Ac 11.27-28 ; 13.1 ; 1 Co 14.29-32 ; 21.10-11).

Les évangélistes étaient les missionnaires formés et instruits par les apôtres, pour défricher le terrain et initier de nouvelles communautés. Leur ministère s’exerce donc hors de l’Église.

Les pasteurs et docteurs sont les enseignants dans l’Église, qui instruisent les fidèles en tant que bergers du troupeau.

V 12 : ces dons variés permettent la diffusion et l’enseignement de la Parole hors et dans les communautés avec un double objectif :

- à l’extérieur prêcher la Parole pour amener à la foi en Jésus-Christ (Rm 10.17) le plus possible de gens en recherche de repères, de vérité et d’amour (v 15). Ce service d’évangélisation dans le monde (v 12b ; 15) fera croître en nombre le corps de Christ qu’est l’Église.

- v 12a,13 : à l’intérieur de l’Église, l’objectif est le perfectionnement des saints. Il faut donc entendre « saints » non comme « parfaits », mais comme « mis à part pour Dieu » toujours perfectibles. C’est une œuvre de l’Esprit intérieure dans le cœur de chaque fidèle pour qu’il sorte de l’enfance de la foi et devienne adulte spirituellement.

Le perfectionnement des fidèles par la Parole s’applique à deux domaines :

  1. l’unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu. La Parole, base de la foi (Rm 10.17), enseignée avec fidélité et respect, permet aux croyants d’être unis par l’Esprit avec Dieu et entre eux. Elle favorise la relation intime (= « connaissance ») avec Christ qui peut habiter dans le cœur (Ep 3.17-19) et rendre capable de vivre dans son amour.
  2. La croissance spirituelle jusqu’à la maturité. En contraste Paul décrit au v 14 l’immaturité spirituelle, caractérisée par l’instabilité dans la foi (Col 2.7-8), par l’influençabilité et l’indécision, la faiblesse devant les séductions (2 Ti 4.3-4). Si le Christ appelle à ressembler à l’enfant, c’est pour imiter sa confiance, sa simplicité de cœur, mais ce n’est pas pour demeurer infantile au point de vue du jugement (1 Co 14.20). Rester enfants en christ, c’est rester « charnels » (1 Co 3.1) soumis à ses impulsions et ses désirs. C’est manquer d’expérience dans la foi, dans la maîtrise de soi et la gestion de sa vie (Hé 5.13). Pour Paul, c’est manquer d’expérience dans la parole de justice qui par l’usage exere le discernement du bien et du mal (Hé 5.13-14). Ce verset est de première importance pour montrer l’action de la Parole dans le cœur. Ce n’est que par un usage persévérant et répété qu’elle apprend à faire la volonté de Dieu (= le Bien). Celui qui n’a pas cette sagesse reste un enfant dans la foi. L’Église par son enseignement de la Parole encourage et accompagne la croissance spirituelle de ses membres. C’est sa mission interne.

- v 13b : Le programme est vaste puisqu’il cherche à atteindre la stature parfaite du Christ. Christ reste le modèle de la foi et de la pratique de tout croyant, qui ne doit pas oublier que la perfection n’est pas le fruit de ses efforts, mais lui sera totalement accordée lorsque sa nature faillible sera changée au retour du Christ (1 Co 15.51-54).

Ainsi connaissance du Christ et croissance spirituelle vont de pair au niveau individuel et au niveau collectif. Il ne suffit pas pour l’Église d’amener à la foi de nouveaux membres, il lui faut aussi apprendre à ses membres à vivre leur foi dans la vérité et l’amour fraternel, à grandir spirituellement en s’entraidant mutuellement à connaître et à pratiquer les enseignements de la Parole.

v 16 : La comparaison de l’Église, corps du Christ qui est la tête, avec le corps humain et sa croissance, insiste sur la cohérence, l’harmonie qui existent entre toutes les fonctions ou les membres grâce aux « jointures qui le soutiennent fortement », ou autrement dit « grâce aux dons spirituels divins » qui lui sont accordés de façon convenable pour sa croissance dans l’amour fraternel. 

Appliquons

  • Quelle est la place de l’étude de la Parole de Dieu dans ma vie, et dans la vie de mon Église ?
  • Comment évaluer ma croissance spirituelle et celle de mon église ? Sur quels critères ?
  • Qu’est-ce que connaître Jésus-Christ pour moi ? Comment cela se voit-il concrètement ?
  • Comment professer la vérité avec amour ?
  • De quels dons mon Église est-elle dotée pour grandir spirituellement ? Comment les exerce-t-elle ? Comment puis-je contribuer à cette croissance en Christ de ma communauté ?

 

08/07/2022

Étude n°3  L’épreuve, vraie cage aux oiseaux  Luc 4.1-11 (16 07 22)

Étude n°3  L’épreuve, vraie cage aux oiseaux  Luc 4.1-11 (16 07 22)oiseau libéré.jpg

"Vous êtes gardés...par la foi pour le salut prêt à être révélé dans les derniers temps. Vous en tressaillez d'allégresse, quoique vous soyez maintenant pour un peu de temps, puisqu'il le faut, affligés par plusieurs épreuves". 1 Pierre 1.5-6

Observons

Le contexte

A quel moment de la vie de Jésus se situe cet épisode. Que représentait-il pour Jésus ?

La structure du texte

4.1-2a : Introduction : Conduit par l’Esprit dans le désert pour y être tenté par le diable.

2b-4 : Première épreuve : le pouvoir sur la nature (changement de pierres en pains)

5-8 : seconde épreuve : le pouvoir sur les hommes et leurs royaumes

9-12 : troisième épreuve : le pouvoir sur Dieu (se jeter du haut du temple)

13 : Conclusion : retrait temporaire du diable.

- Pourquoi l'Esprit envoie-t-il Jésus au désert ?

- Que cherche Satan en tentant Jésus ? Sur quoi portent au fond les trois tentations ? Par quel moyen Satan le tente-t-il ? Comment Jésus répond-il ?

- Comment Jésus sort-il de ces tentations ? Quelles leçons tirer pour nous de ce récit ?

Comprenons

Le contexte

Jésus vient d’être baptisé dans le Jourdain par Jean le Baptiste, en Judée. Il a reçu de Dieu la confirmation de son identité (3. 22) de Fils de Dieu, incarné dans la lignée d’Abraham, de Sem et d’Adam (3.23-38). La puissance du Saint-Esprit est descendue sur lui pour l’aider à accomplir sa mission. (22)

Le baptême de Jésus est difficile à interpréter si l’on considère la nature divine de Jésus : il n’avait nul besoin de ce symbole de purification et de pardon des péchés ; il était parfaitement juste ! Si l’on considère son humanité de fils d’Adam, « semblable à ses frères en toutes choses » (Phi 2.7 ; Hb 2.17)sauf en ce qui concerne le péché, Jésus devait passer par les eaux du baptême pour signifier par un geste concret  à la fois sa « mort », son renoncement à son ancienne vie de simple homme de Nazareth, anonyme et silencieux, et son engagement dans sa nouvelle vie publique et sa mission de Messie. Par ce symbole de mort et de résurrection (Rm 6) Jésus annonçait les caractères essentiels de sa vie terrestre et de sa mission de salut. L’approbation divine qu’il reçoit par l’envoi de l’Esprit, et sa reconnaissance par le Père comme Fils de Dieu lui confirment le bien-fondé de son acte symbolique, et lui donnent la plénitude de la puissance divine pour affronter une vie de douleur et de renoncement à soi, jusqu’au sacrifice de la croix et …une glorieuse résurrection.

Le texte.

1- L’introduction : Les trois récits de la tentation de Jésus (Mt 4.1 ; Mc 1.12 ; Lc 4.1) commencent tous par les mots « Poussé (chassé, jeté, conduit) par l’Esprit au désert, pour (Mt) y être tenté par le diable », « où (Marc et Luc) il était tenté par le diable pendant quarante jours ». Comment est-ce possible ? Dieu veut-il mettre en difficulté, éprouver son Fils, au risque de sa chute et de l’anéantissement de sa mission ? On retrouve cette prise de risque de Dieu dans l’Ancien Testament, dans les récits de l’envoi du peuple hébreu sorti de l’esclavage d’Égypte, sur le chemin du désert, où il se heurtera aux épreuves de la Mer Rouge (Ex 14), de la soif (Ex 15.22-27 ; 17.1-5) de la faim (Ex 16), ou de l’hostilité des voisins nomades (Ex 17.8-16). A chaque expérience, le peuple eut l’occasion d’éprouver sa confiance en Dieu, de purifier sa foi (1 Pi 1.6-7), de progresser dans sa marche avec Dieu physiquement et spirituellement.

De même le prologue de Job, si scandaleux à nos yeux, où Dieu donne délibérément à Satan le pouvoir d’éprouver son serviteur juste Job, peut nous amener à comprendre les versets introductifs de la tentation de Jésus.

 L’intention de Dieu n’est pas que Jésus soit tenté (Jc 1.13), ou que Job souffre. Dieu cherche à éclairer son peuple, son serviteur Job, et même son Fils, sur leur état intérieur, sur le sens de leur vie, sur la profondeur de leur confiance en Lui, et sur la place qu’Il tient dans leur cœur et leurs décisions.

L’épreuve n’est pas un test sadique pour faire connaître à Dieu la résistance de ses enfants : Dieu connaît d’avance le cœur et la vie de chacun. L’épreuve est un test pour chacun de ses enfants, qui a besoin d’être confronté à lui-même, comme le sportif teste ses capacités dans des exercices progressifs. Dieu sait aussi que  « dans le désert de la solitude, du silence, du dépouillement des préoccupations terrestres et matérielles, il pourra mieux préciser ses choix de vie (voir Gomer menée dans le désert pour découvrir sa réalité profonde et y entendre la voix de Dieu désirant renouveler son alliance avec elle : Osée2.10-22).

Ainsi après son baptême qui signe l’engagement de Jésus dans sa mission, Dieu l’envooiseaux en cage bleu.jpgie en « retraite », en « quarantaine », pour qu’il ait la claire conscience de ce qu’implique cette « mort » qu’il a mimée dans son baptême. Comme l’oiseleur qui couvre la cage et l’obscurcit pour apprendre à ses oiseaux à chanter une mélodie sans être distraits par l’environnement.

Dans la solitude et le jeûne, Jésus peut méditer sur les choix à faire pour remplir sa mission de Messie, Fils de Dieu, Sauveur. Marc dit qu’il était  avec les bêtes sauvages et que les anges le servaient (1.13 ; Mt 4.11). Ces bêtes sauvages symboliseraient-elles les épreuves, les souffrances extérieures et intérieures qu’il affronta dans cette retraite, et qu’il maîtrisa grâce à la sollicitude de son Père et à son attachement à sa Parole ?

Le jeûne prolongé qu’il s’impose n’est pas une simple purification physique, mais une préparation spirituelle et une consécration entière à sa relation avec Dieu. Aucune préoccupation extérieure ne doit disperser sa concentration.

2- La première épreuve (3-4)

Le diable, ou l’Adversaire, profite de la faiblesse physique de Jésus dont l’humanité est bien réelle puisqu’il éprouve le besoin de manger. Satan utilise ce besoin naturel et vital pour tenter Jésus et l’inciter à tester son pouvoir de Fils de Dieu pour son profit immédiat et élémentaire : se pourvoir en pain à partir des pierres du chemin, utiliser son pouvoir sur la nature pour sa satisfaction personnelle et matérielle. La tentation de l’égoïsme et du matérialisme se double d’une autre tentation plus subtile à laquelle l’homme n’a pas su échapper : l’abus du pouvoir humain sur la nature. Cet abus se manifeste aujourd’hui dans tous les domaines et provoque le mouvement de l’écologie pour sauver la planète : transformer des pierres en pain, c’est maintenant pour faire du profit, transformer des forêts en papier, épuiser les sources d’énergie non renouvelable, forcer génétiquement les céréales, engraisser chimiquement les champs, nourrir les animaux aux hormones ou aux farines animales, utiliser les embryons humains pour la recherche médicale ou bientôt le clonage, comme s’ils étaient de simples objets, pousser ses performances physiques et intellectuelles par des drogues ou des stupéfiants, changer son apparence physique par des chirurgies coûteuses. Toutes ces attitudes relèvent de la même tentation d’abuser de son pouvoir sur l’environnement naturel et sur sa propre nature humaine, au nom du profit qu’on peut en tirer.

Jésus repousse cette tentation en lui opposant les Écritures, qui élèvent la conscience des préoccupations matérielles à  la satisfaction des besoins spirituels qui font de l’homme une créature à part dans le monde animal, un vis-à-vis et une image de Dieu (Gn 1.26-27). Sa nourriture spécifique est d’ordre spirituel : la Parole de Dieu (Lc 4.4). Par ces mots, Jésus annonce aussi l’orientation de son ministère : amener l’homme à dépasser le terrestre, à ne pas s’en contenter, pour voir et entendre les réalités du monde spirituel divin.

3- La seconde épreuve (5-8)

Ici encore nous trouvons une tentation d’abuser de son pouvoir, cette fois sur les hommes. C’est l’aspiration, ô combien universelle, de dominer les autres, d’avoir une emprise sur eux, de diriger leur vie selon sa propre vision. C’est une des conséquences de la séparation d’avec Dieu prophétisée au premier couple : (Gn 3.16) « Tes désirs se porteront vers ton mari, mais il dominera sur toi». Les relations d’amour entre les hommes sont transformées en rapports de force. On retrouve aussi cette tentation dans l’histoire de Babel. L’unification du monde sous un seul pouvoir, avec une pensée unique (= un même langage) et un même projet mégalomane, conduisait à un totalitarisme universel, que Dieu vint empêcher, pour permettre à ses enfants de survivre, libres de le servir (Gn 11.1-9).

Jésus, en tant que Dieu, avait cette possibilité et même le droit, de diriger le monde. Comme Adam au moment de la chute  à la Création, il pouvait être tenté d’utiliser ce pouvoir glorieux après son incarnation. Mais celle-ci aurait été rendue vaine !

Lorsque Satan s’attribue le pouvoir sur les royaumes, et la capacité de le « donner à qui il veut », il prononce une demi-vérité : Depuis Adam qui la lui a abandonnée, il possède en effet la maîtrise du monde, mais il ne peut  en disposer à sa guise, car il dépend de la volonté de l’homme d’accepter ou de rejeter l’offre satanique de la toute-puissance sur l’autre. Ce que Satan appelle se prosterner devant lui, l’adorer, c’est l’acceptation par l’homme de se soumettre à sa tyrannie, en obéissant aux désirs naturels d’un cœur sans Dieu.

Ainsi l’épreuve devient une occasion de choisir : rester fidèle à Dieu comme Jésus, en se considérant comme un serviteur aimant (Mt 24.45-46 ; Luc 22.25-26 ;  Pi 5.5-6), et non un maître potentat (Mt 24. 49), ou s’imposer à l’autre et chercher à le dévorer. Ce second volet de l’alternative est à l’origine de tous les esclavages, anciens ou nouveaux : par exemple, dans le domaine du travail soumis aux principes de la productivité et de la rentabilité, on voit se multiplier les suicides de cadres trop stressés, ou à cause de la mondialisation, des familles entières au chômage, ou des enfants et des ouvriers misérables exploités dans les pays dits en développement ; dans le domaine des relations personnelles, les violences conjugales, les « crimes d’honneur », les meurtres "religieux" de nouveaux convertis chrétiens, se multiplient et causent de nombreuses victimes. Les exemples ne manquent pas au niveau mondial, mais qu’en est-il au niveau personnel ? La volonté de dominer l’autre peut motiver nos attitudes, souvent inconsciemment, et provoque violence verbale, mépris de l’autre, manipulations diverses, mensonge et vanité, qui pourrissent les relations.

Pour la seconde fois, Jésus oriente ses regards sur la Parole de Dieu pour refuser de se soumettre à Satan, et rappeler le sens de la vie humaine : rendre un culte à Dieu, adorer son Seigneur. Cela implique l’abandon du désir de pouvoir (Phi 2.3, 6) et l’engagement dans un service les uns des autres pour la gloire de Dieu seul (Jn 13.14-15 ; 1 Co 6.20b).

4- La troisième épreuve (Luc 9-12)

Satan essaie de pousser Jésus à utiliser son pouvoir de Fils de Dieu pour accomplir sa mission sans passer par la mort  ni la souffrance, grâce à un miracle extraordinaire. Puisque sa mission comprend la révélation de Dieu aux yeux des hommes, qu’il se révèle lui-même tout de suite comme possédant le pouvoir de Dieu, comme immortel et au-dessus des lois physiques du monde ! Les foules ébahies ne pourraient qu’être attirées par lui, puisqu’elles attendaient un Messie glorieux et tout puissant.

Pour Jésus c’était la voie facile, le raccourci égoïste vers la gloire divine. Pour nous, cette tentation du pouvoir divin s’assimile à la présomption qui nous fait prendre la place de Dieu, en décidant par exemple de faire le tri par nous-mêmes entre le « bon grain » et « l’ivraie » (Mt 13.28-30), ou encore en prenant notre volonté pour celle de Dieu dans les décisions de la vie de famille ou d’église. Cette tentation est très subtile car elle se pare du voile de la religion, et même de la Parole de Dieu (Luc 4.10-11). On se réclame des promesses divines, on croit être dans la bonne voie, sans discerner qu’en fait on cherche à manipuler Dieu, à trouver des solutions plus rapides à sa place (voir l’histoire d’Abram et Agar, Gn 16.1-3 ou celle de Jacob, Gn 25.29-34 ; 27.1-29). On se leurre sur ses propres motivations profondes qui ne sont que la copie de la tentation originelle « Vous serez comme des dieux ! » (Gn 3.4-5), indépendants, immortels et tout puissants.

Jésus n’est pas dupe de cette utilisation de l’Écriture par Satan, et de sa ruse. Pour la troisième fois il repousse sa suggestion. Sa mission n’est pas de révéler un Dieu « surhomme » et glorieux, mais un Dieu qui aime tellement ses enfants qu’il est prêt à se sacrifier pour qu’ils aient la vie éternelle (Jn 3.16).

A son exemple, pour repousser cette tentation de pouvoir divin, il nous est demandé d’accepter de passer avec humilité par l’épreuve de notre foi.  Dans les obstacles et les difficultés à surmonter, la foi est purifiée et fortifiée (1 Pi 1.7), car Dieu en nous remplissant de son Esprit nous donne les forces de traverser l’épreuve (1 Co 10.13), et d’en faire une occasion de croissance spirituelle.

Questions pour une application dans la vie chrétienne

  • Dans la souffrance quelles sont mes plus grandes tentations: maudire Dieu comme la femme de Job (Job 2.9), me résigner et attendre que cela passe, refuser la situation et lutter pour éliminer à tout prix ma souffrance ou éloigner la mort, faire de la situation une occasion de plaintes ou d’accusation des autres et imposer à mon entourage l’aigreur de mon caractère ? Comment puis-je éviter de retomber continuellement dans les mêmes schémas de comportement en réaction contre ce qui m’arrive de douloureux ?
  • Comment puis-je faire de l’épreuve, si petite soit-elle (une vexation, une contrariété, un incident inopiné, etc.) une occasion de grandir dans la foi, dans l’amélioration de mon caractère et de mon comportement (= la sanctification), et dans le service des autres ?
  • En quoi suis-je concerné(e) par les trois tentations de pouvoir (sur la nature, sur les hommes et sur Dieu) présentées à Jésus ? Que l’Esprit m’inspire et me guide pour discerner avec honnêteté les ressorts profonds de mes attitudes et de mes actes, et pour trouver en Dieu la force de repousser ces tentations !
  • Par quelles expériences douloureuses ai-je conscience d’avoir appris à fortifier ma foi? Comment ma relation à Dieu et aux autres en a-t-elle été modifiée ?