27/05/2016
Étude n°10 Jésus à Jérusalem Mat 22.1-14 (04 06 16)
Étude n°10 Jésus à Jérusalem Mat 22.1-14 (04 06 16)
« Jésus leur dit : «N’avez-vous pas lu dans les Écritures : La pierre qu’ont relevée ceux qui bâtissaient est devenue la principale de l’angle ; c’est du Seigneur que cela est venu et c’est une merveille à nos yeux ? »Mat 21.42.
Observons
Contexte : Après être entré à Jérusalem (21.1-9), avoir chassé les vendeurs du temple et séché le figuier stérile en signe de son jugement sur ce que les Juifs avaient fait de la Maison du Père (21.13), et du sort réservé à son peuple incrédule (21.18-22), Jésus enseignait dans le temple avec l’autorité divine. Sous forme de paraboles il cherchait à interpeller le peuple sur son attitude face à la volonté divine (paraboles des deux fils et des vignerons, 21.23-39). Très habilement, Jésus fait prononcer par ses auditeurs leur propre condamnation (v 41). Il en donne aussitôt le sens prophétique (v 42-43) : la mission de son peuple, parce qu’il a rejeté la pierre angulaire de la foi, qu’il est lui-même, sera confiée à une autre nation plus fructueuse ! Les Pharisiens et les sacrificateurs comprennent enfin qu’ils sont concernés et furieux cherchent à le faire mourir.
Texte : Mat 22.1-14
Une dernière parabole de Jésus va être encore plus explicite sur le « jugement » de Dieu.
a) 2-7 : Vaine invitation du roi pour son festin de noces, et condamnation à disparaître des récalcitrants.
b) 8-10 : Invitation lancée à tous les « méchants et bons » qui le veulent
c) 11-14 : renvoi de l’invité qui n’a pas revêtu son habit de noces.
Le récit est composé de deux paraboles très voisines, dont l’axe est l’appel à participer au festin des noces (v 8-10)
Première parabole de Matthieu 22.2-10 :
- Qui est l’initiateur de l’invitation au repas des noces ? v 2
- Comment se marque son insistance à inviter (répétitions, adverbes,… ? v 3-4
- Comment répondent les invités ? v 5-6
- Quelle est la réaction de l’hôte envers ses premiers invités ? Quelle menace est sous-jacente pour le peuple juif du temps de Jésus ? v 7
- Qu’est-ce que cela signifie au plan du salut pour tous ceux qui refusent l’invitation de Dieu ?
- Pourquoi l’hôte juge-t-il ces premiers invités « indignes » des noces ? En quoi consiste la dignité pour participer aux noces ? v 8
- Où se trouvent les seconds invités ? v 9-10. Si les premiers représentent le peuple Juif, que peuvent représenter ces seconds invités qui répondent aussitôt ?
Deuxième parabole de Matthieu 22.11-14 :
- Quelles différences et ressemblances discernez-vous entre les deux paraboles ?
- Que peuvent représenter l’inspection des convives par le roi (v 11) et l’habit de noces (voir Zac 3.1-5 ; Ap 19.8)
- Comment le roi s’adresse-t-il à l’invité sans habit ? v 12
- En comparant le passage avec la parabole de Luc 18.9-14, que signifie l’entrée de cet invité sans habit de noces ? Que lui manquait-il pour participer aux noces ?
- Que représentent les « ténèbres du dehors » ? L’expression « Il y aura des grincements de dents » donne-t-elle crédit à la croyance à l’enfer éternel ? Comment la comprendre ?
- Quelle différence faire entre appelé et élu ? Quelles sont les conditions spirituelles pour être élu ?
Comprenons (Vitrail de la parabole de l’habit de noces, Chaumontel)
Matthieu rassemble dans son livre beaucoup de paraboles dites du Royaume. Jésus y donne les grandes caractéristiques de son Royaume spirituel, sous forme d’histoires simples, tirées du vécu de ses auditeurs, mais ayant un sens symbolique,
La parabole des noces termine la série, avant celle des paraboles du jugement des croyants et des non croyants (ch 24.45-25.46). Cette parabole des noces est la réponse de Jésus aux mauvais projets de ses adversaires (21.46), lorsqu’ils comprirent que Jésus parlait d’eux dans les paraboles des deux fils et celle des vignerons (ch 21).
Jésus ayant annoncé (v 2) une ressemblance du royaume céleste, on s’attendrait à ce que le deuxième point de la comparaison ne soit pas une personne ! Or cette seconde partie de la comparaison est le récit des actes d’un roi.
Jean-Baptiste avait annoncé le royaume de Dieu en appelant les foules à se repentir et à confesser leur péché (Mat 3.2, 6). Il avait aussi mis en garde les Pharisiens et les Sadducéens contre leur présomption de fils d’Abraham, qui les empêchait de produire les fruits de la repentance (Mat 3.7-10). Et voilà que Jésus reprend la même idée dans cette double parabole des noces, dans un contexte de jugement.
Le thème des noces se retrouve dans Luc 12.36 : « Soyez semblables à des hommes qui attendent que leur maître reviennent des noces, afin de lui ouvrir aussitôt qu’il arrivera ! ». Puis dans Luc 14.8 « Lorsque tu es invité par quelqu’un à des noces, ne va pas occuper la première place, de peur qu’une personne plus considérée que toi n’ait été invitée. » Enfin dans l’Apocalypse (19.7,9) les noces du Fils sont appelées les noces de l’Agneau. Certains détails de cet événement joyeux de la vie des Israélites sont précisés dans la parabole des dix vierges de Mat 25.1-13. L’entrée dans le royaume céleste est donc représentée comme une fête célébrant l’alliance de deux époux, le Fils ou l’Agneau et l’Epouse ou l’Église, ou encore le fidèle.
La première parabole de Matthieu insiste sur l’invitation lancée à tous pour participer à ces noces. Le passé employé au v 3 « ceux qui étaient ou avaient été invités » rappellent que l’invitation avait été lancée bien avant ce rassemblement des invités. Comme Jésus a parlé précédemment du figuier stérile, des deux fils et des vignerons, paraboles dans lesquelles se sont reconnus les Pharisiens, les premiers invités de notre parabole représenteraient le peuple juif qui depuis Moïse et les prophètes (ses serviteurs v 3-4) a reçu l’invitation au Royaume, les promesses et les lois (Rom 9.4-5). Le Maître ne cesse de l’appeler avec insistance, jusqu’au jour des noces mêmes, où tout est prêt. Mais c’est en vain. Les invités refusent délibérément, et se trouvent des excuses matérielles ou affectives comme la parabole parallèle de Luc 14 nous le révèle : achat d’un champ, ou de bœufs, mariage. Ce qui se passe sur la terre est beaucoup plus intéressant que la proposition d’alliance spirituelle ! Au-delà du peuple juif contemporain de Jésus, ne retrouve-t-on pas le même état d’esprit dans nos sociétés matérialistes, et parfois aussi dans les églises, qui ont perdu leur « premier amour » (Ap 2.4). L’insistance du Maître est perçue enfin comme une agression et provoque la violence des invités contre ceux qui les appellent, qu’ils assassinent. On reconnaît là le sort funeste de la plupart des prophètes et surtout celui du Fils même (Mat 21.36-39). Le roi de la parabole les juge indignes de participer aux noces, car ils les ont méprisées, jugées moins importantes que leurs affaires terrestres et se sont révoltés avec violence contre ceux qui les pressaient de répondre à l’invitation du roi. Jésus réitère la menace de mort prononcée déjà à propos des vignerons meurtriers (Mat 21.41) : colère du roi, mort et ville incendiée. Cette prophétie se réalisa à la lettre en 70 après Jésus-Christ, où Jérusalem fut détruite par les armées romaines, considérées comme les instruments du jugement qu’elle s’était attirée par son refus de répondre à l’appel de Christ. Lorsqu’on se détourne de la vie et de la joie proposées par Dieu, on ne récoltera que mort et disparition ! Les réalisations historiques ne sont que les préfigurations concrètes du sort spirituel qui entérinera le refus volontaire d’entrer dans le royaume de Dieu.
L’invitation aux noces refusée avec dédain et désinvolture par les premiers convives représentant le peuple d’Israël, est lancée à toutes les nations, « méchants et bons » (= incroyants et « prosélytes » ?) qui s’empressent d’y répondre (v 10). Le refus par Israël de la Bonne Nouvelle du salut permet aux autres peuples de l’entendre avec gratitude (Rom 9.25 ; 10.20-21 ; surtout 11.11).
Toutefois dans son amour et son désir de remplir son royaume, le roi continue d’appeler d’autres invités, ceux qui sont dans les carrefours et sur les chemins (v 9-10). La parabole de Luc 14.15-24 est plus détaillée : après les premiers invités, que l’on peut comparer aux Pharisiens, les serviteurs vont chercher les parias de la ville, estropiés, pauvres, aveugles, boiteux, ceux qui étaient méprisés par les autres « bien-pensants ». Puis une troisième fois, les serviteurs sortent inviter ceux qui sont extérieurs à la ville, au peuple juif, mais pourtant en chemin vers le royaume, cherchant aux carrefours religieux à rencontrer un Sauveur. Dieu les connaît et répond à leurs aspirations secrètes, en leur envoyant ses invitations. Curieusement Matthieu ajoute que tous sont rassemblés, « méchants et bons » (v 10). Les serviteurs ne sélectionnent pas les destinataires des appels divins, qu’ils soient « impies ou croyants », ils ont reçu ces invitations et y ont répondu, de sorte que la salle des noces est remplie. Ainsi se termine la première parabole du passage.
Jésus ajoute un détail que la parabole parallèle de Luc 14.15-24 ne contient pas :
Le récit rebondit alors à partir du verset 11 en une seconde parabole, l’habit de noces. peut-être en écho au mot « méchant », pour s’attacher à un personnage qui détonne dans l’assemblée car il n’a pas revêtu l’habit de noces. Apparemment il était de coutume pour un roi d’offrir à ses invités la tenue adéquate au festin de noces, pour que la fête n’exclue personne à cause de sa pauvreté, qu’il n’y ait pas de jalousie entre les convives et que les noces soient célébrées par tous au grand honneur des mariés.
Le thème de l’habit est récurrent dans la Bible, car c’est à son vêtement qu’on identifiait la position sociale, ou la fonction professionnelle de chacun. Depuis le vêtement de peau offert par le Créateur au couple déchu pour subsister sur la terre remplie de péché (Gen 3.21), jusqu’à l’habit de noces dont est revêtue l’Épouse de l’Agneau (Ap 19.8), nombreuses sont les mentions de ce vêtement du salut (Es 61.10) dont Dieu revêt le pécheur, pour couvrir ses vêtements sales ou sa nudité (Zac 3.3).
Spirituellement, cet habit de noces représente la justification, le pardon que Dieu offre à chacun gratuitement. Comment cet invité de la parabole a-t-il pu entrer dans la salle de noces sans avoir accepté le don de Dieu ? En fait, la question n’est pas là, car la parabole ne répond pas aux « comment » mais plutôt aux « pourquoi ». Jésus veut enseigner ses disciples sur l’état d’esprit nécessaire pour entrer dans le royaume de Dieu : il ne s’agit pas de croire avoir automatiquement le droit d’y entrer parce qu’on est juif, ou pratiquant des formes de la religion, ou méritant par ses « bonnes œuvres ». Il faut se reconnaître humblement dépendant de la grâce de Dieu, attendre d’être considéré comme juste par lui seul (= justification), et se saisir de son pardon avec un cœur reconnaissant et confiant.
Pour avoir part au festin de noces, pour entrer dans l’alliance avec Dieu, le simple désir humain ne suffit pas. Il faut accepter la seule condition que Dieu y a mise : l’acceptation du salut par grâce, la reconnaissance que ses propres efforts de pureté et de sainteté ne servent à rien, qu’aucun mérite, aucune «ceinture de feuilles de figuier » (Gen 3.7), (Zabou, Dis Papa, explique-moi le vêtement) ne peut couvrir notre nature pécheresse, et que Dieu seul peut transformer les haillons de cette nature en habits de lumière, de justice et d’amour, par la grâce du sacrifice de son Fils en notre faveur, pour nous rendre dignes de la communion éternelle avec Lui. « Il faut en effet que ce corps corruptible revête l’incorruptibilité, que ce corps mortel revête l’immortalité » (1 Cor 15.53), qui n’appartiennent qu’à Dieu (1 Tim 6.16). Ainsi cette parabole de l’habit de noces est-elle le revers de la vision de Zacharie 3.1-5 : A l’inverse du sacrificateur Josué, le convive de la parabole a refusé par orgueil, présomption et absence de repentir, que Christ lui ôte ses « vêtements sales » et le revête « d’habits précieux et d’un turban pur » ! Le convive entré sans se revêtir de son habit de fête est rudement renvoyé, ligoté et jeté dehors, dans les ténèbres de la solitude sans Dieu. Sa fin tragique donne toute son importance au symbole de l’habit de noces.
Nous sommes de même jugés sur notre refus ou notre acceptation de l’œuvre de Jésus-Christ pour nous (Jn 3.17-18). C’est Lui, notre habit de noces, qui nous permet de nous asseoir à sa table pour l’éternité.
Questions pour une application dans la vie chrétienne
- Par quelles paroles de Dieu ai-je entendu son appel à la vie éternelle ? Comment y ai-je répondu ?
- Quelles excuses est-ce que je me donne pour ne pas obéir à l’invitation de Dieu ? Pourquoi ?
- A quoi me pousse mon désir d’entrer dans le royaume ? Comment éviter de me considérer comme méritant d’y entrer ?
- Que signifie se revêtir de Jésus-Christ ? Est-ce prendre l’apparence de la piété et de la sainteté ? Est-ce cacher aux yeux des hommes nos faiblesses, nos doutes, nos erreurs, nos révoltes, sous une apparence de paix de joie et d’amour ? Est-ce obéir scrupuleusement aux exigences de la loi ? Est-ce perdre notre vraie personnalité profonde ? Est-ce devenir des chrétiens tous identiques ? Essayons de donner une définition simple et concrète de cette expression !
- De quel autre « habit » ai-je tendance à me revêtir pour assurer mon salut ?
- Le jugement de Dieu m’apparaît-il comme un festin de noces ou un tribunal ? Quelle influence ces visions ont-elles sur notre comportement ?
08:00 Publié dans Matthieu | Lien permanent | Commentaires (0)
20/05/2016
Étude n°9, Les idoles de l’âme, Mat 19.16-30 (28 05 16)
Étude n°9, Les idoles de l’âme, Mat 19.16-30 (28 05 16)
Jean 14.15 : « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements ».
Observons
Le contexte
Après la transfiguration, Jésus descend de la Galilée vers le nord de la Judée, par la route à l’est du Jourdain (19.1). Les Pharisiens l’interrogent sur la répudiation pour le mettre à l’épreuve (v 2), et les disciples veulent écarter les enfants de Jésus, à sa grande indignation.
Le texte
V 16 : rencontre avec le jeune homme riche (Heinrich Hoffmann, 19ès)
V 17-22 : dialogue de Jésus avec le jeune homme : « Va, vends tout et suis-moi »
V 23- 30 : dialogue de Jésus avec ses disciples :
a) 23-25 : difficulté pour les riches d’entrer dans le royaume de Dieu
b) 26 : Seul Dieu peut sauver
c) 27-30 : Celui qui est libéré de ses liens reçoit de Dieu au centuple, ici-bas et dans l’éternité.
Questions sur le passage v 16-22 :
- Quelle est la préoccupation du jeune homme ? Comment approche-t-il Jésus ?
- Comment Jésus répond-il au jeune homme sur le mot « bon » ? Que veut-il faire comprendre à son interlocuteur sur la « bonté » ? A quoi le renvoie-t-il ? (v 17)
- Quels commandements Jésus cite-t-il ? Pourquoi rajoute-t-il : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » et ne cite-t-il pas les 4 premiers commandements du Décalogue ?
- Que prouve l’exclamation du jeune homme sur son état d’âme et sur sa vision de la Loi ?
- Que demande réellement Jésus à ce jeune homme ? Faut-il devenir pauvre pour suivre Jésus ? Que signifie avoir un trésor dans le ciel ? (Mat 6.19-21). En quoi est-ce différent des richesses terrestres ?
- Quelle est la réaction du jeune homme aux paroles de Jésus ? « s’assombrir = être consterné). Comment a-t-il compris les paroles de Jésus ? (2 Cor 3.16).
Questions sur les v 23-30
- Comment Jésus commente-t-il le refus du jeune homme riche ? Quel est le sens de l’image employée ? Qu’en concluent les disciples ? Comment Jésus les rassure-t-il ? v 24-25
- En se comparant au jeune homme qu’espère Pierre ? Que lui promet Jésus ? Pour quand ? Quelle sera la position de ceux qui auront suivi Jésus ? Quels disciples sont concernés par le v 29 ? De quels abandons s’agit-il ? Qui sont les premiers er les derniers, dans la phrase de conclusion de Jésus ?
Comprenons
Cet épisode peut servir d’application à l’enseignement de Jésus dans le discours sur la montagne Mt 6.19-23 : « Là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur ».
Matthieu et Luc nous disent que celui qui s’approcha de Jésus était un jeune homme (Matthieu 19.20-22), magistrat ou chef de synagogue (Luc 18.18). Il était sincèrement préoccupé de la question la plus importante de la vie humaine : avoir la vie éternelle. Comme les Pharisiens, il pensait l’obtenir par une obéissance scrupuleuse à tous les commandements, mais restait dans le domaine du « faire » (Que dois-je faire ?), et non de la relation avec Dieu « Qui suis-je devant Dieu ?).
Son empressement auprès de Jésus marque toute son inquiétude sur le sujet. Le titre qu’il lui donne «Maître », révèle la vénération qu’il porte à Jésus, considéré comme un homme exemplaire, pour sa bonté, sa justice et sa connaissance de la Parole. En même temps qu’il prend Jésus comme Maître, le jeune homme s’estime capable de faire quelque chose de bon comme Lui, puisqu’il obéit à tous les commandements. Jésus le reprend pour lui montrer qu’il se fait des idées fausses sur la condition du salut. Il n’est pas question de faire « le bon ou le bien », mais de regarder au seul Dieu bon ! En reprenant le jeune homme sur cette expression, il le place devant la question : Penses-tu qu’un homme puisse atteindre la perfection de Dieu par son « faire » ?
Puis Jésus le renvoie à la loi qu’il connaît, pour lui faire prendre conscience de son but : la loi est un pédagogue qui mène à Christ (Galates 3.24). Le jeune homme connaît la loi, mais en demandant quel commandement serait nécessaire, il s’attend à un précepte extraordinaire, réclamant un effort spécial de sa part : Jésus va le lui enseigner un peu après sur un point auquel le jeune homme ne s’attendait pas ! Jésus passe en revue les commandements sociaux de la seconde table de la Loi, peut-être parce que leur observation est plus facile à prouver. Il y rajoute le commandement de l’amour sans lequel tous les autres perdent leur sens, On peut avoir toute la connaissance biblique, et faire tous ses efforts pour suivre la lettre de la loi, sans avoir saisi la condition du salut : se reconnaître incapable devant Dieu d’obéir, accepter que Dieu donne gratuitement son pardon et son salut à celui qui les lui demande (Romains 3.24), et agir en toutes choses par amour de Dieu et des autres. Le jeune homme ne répondait à aucune de ces conditions intérieures. Il se croyait très obéissant, il pensait qu’il fallait mériter son salut par ses actes, il n’avait pas l’amour des autres pour partager ses biens !
Jésus vit que le jeune homme était sincère dans sa démarche et dans la confiance qu’il plaçait en lui. Il s’était sincèrement efforcé d’obéir, mais ne se sentait pas pour autant en paix. Il avait le sentiment qu’il lui manquait encore quelque chose ( Mat 19.20), mais était incapable de passer du littéral, du matériel, du Faire, au spirituel et à l’Etre. Par son exigence poussée à l’extrême, Jésus va chercher à lui faire découvrir son être intérieur, ses vraies priorités, ce qui le divise intérieurement. Son cœur reste attaché aux biens matériels. Il a suffi à Jésus de regarder le jeune homme pour déceler en lui, sa sincérité et son angoisse existentielle, et dans son amour, il cherche à lui faire entrevoir un trésor supérieur, spirituel, donc impérissable, susceptible de rendre le sacrifice de ses biens moins pénible.
Suivre Jésus, c’est accepter de se laisser emplir de son amour, ce qui rend les autres amours moins importants ; c’est accepter d’être dépouillé par Lui des attaches de son cœur avec le matérialisme ou tout autre addiction et même avec les affections humaines les plus légitimes. Si on les fait passer avant l’amour pour Dieu, on risque de passer à côté de l’essentiel, la vie éternelle avec Dieu. Les dangers que Jésus nous demande d’éviter par ce récit, pourraient être :
1- rester à la lettre des paroles divines et ne pas en chercher aussi le sens spirituel (concernant la relation à Dieu).
2- croire que par son obéissance aux commandements, on acquiert un droit d’entrée dans le royaume éternel.
3- négliger la relation d’amour avec les autres, loi fondamentale du royaume de Dieu.
V 23-31 : Commentaires de Jésus
Après avoir prononcé une sentence absolue sur la difficulté des riches à entrer dans le Royaume de Dieu (v 23), Jésus adoucit l’explication : ce ne sont pas les richesses en elles-mêmes qui sont des obstacles, (elles étaient considérées d’ailleurs comme des signes de la bénédiction divine, 1 Chr 29.12 ; Ec 5.18), mais c’est la disposition du cœur et de l’esprit à mettre sa confiance en elles.
Pour insister sur l’impossibilité humaine d’entrer dans le Royaume spirituel sans abandon de soi à Dieu, Jésus emploie une expression devenue proverbiale, fondée sur le contraste entre l’animal chargé, utilisé dans les caravanes commerciales, et le minuscule passage dans « le trou de l’aiguille ». La difficulté apparaît au premier abord comme une impossibilité totale, mais elle prépare le remède : à Dieu rien n’est impossible (v 26). Il faut un miracle de la grâce pour que le cœur se donne entièrement à l’amour de Dieu et considère ses affections et amours terrestres passagers comme de moindre importance (voir dans Philippiens 3.3-11 l’expérience de Paul).
Si comme on le suppose le « chas de l’aiguille » était le nom donné à la petite porte qui permettait aux piétons d’entrer dans la ville lorsque la grande porte était fermée le soir, le symbolisme de la comparaison devient frappant. Pour pénétrer par cette porte, le chameau chargé était obligé de déposer ses fardeaux, et de s’agenouiller pour passer. Le « riche » chargé de biens matériels ou intellectuels, pour pénétrer dans le Royaume par la porte qu’est Christ, doit se dépouiller de la confiance qu’il place dans ses possessions terrestres, et s’agenouiller devant Christ en reconnaissant sa dépendance totale de lui. Paul en a fait l’expérience à sa conversion Phi 3.4-9).
(Dessin de Zabou dans le livret « Dis, papa, explique-moi...l’argent et la dîme »diffusé par la FFS)
Les disciples encore très attachés à une conception terrestre et matérialiste du royaume de Dieu, s’étonnent puis s’inquiètent de ce dépouillement nécessaire au salut. D’un autre côté ils se glorifient de leur propre dénuement (27). Jésus ne reprend pas Pierre sur ce point réel et les stimule par la promesse de recevoir un trésor inestimable : une place d’honneur dans le royaume de Dieu, au renouvellement de toutes choses, au retour de Fils de l’Homme glorieux, c’est-à-dire lorsque Dieu recréera la terre sans le Mal (Ap 21.1-4). Cet honneur consistera à juger Israël, que les douze tribus soient considérées littéralement, ou spirituellement comme l’ensemble des croyants : les douze apôtres et tous les disciples de Jésus se retrouveront autour de l’Agneau pour constater (= juger comme jurés) la justice de Dieu qui aura sauvé les uns, et accepté le refus de le suivre des autres (Ap 20.4-6). Puis Jésus reprend la question de l’abandon nécessaire pour le suivre en insistant sur les affections terrestres tout à fait légitimes par ailleurs, mais dangereuses si elles prennent le pas sur l’amour de Dieu. Mettre sa confiance en Dieu et non dans ses biens ou ses acquis (affectifs, intellectuels, matériels, ou même spirituels) procure la paix du cœur, la joie et l’énergie pour suivre Jésus. Et ceux qui sont considérés dans la société comme les plus petits ou les plus pauvres ou les derniers dignes d’entrer dans le royaume, ceux qui savent qu’ils dépendent de Dieu pour leur vie, devanceront dans le royaume ceux qui sont pleins d’eux-mêmes, ou qui s’appuient sur leurs possessions, ceux dont le cœur est attaché au terrestre, tout en se croyant les premiers à entrer dans le royaume (30),
Questions pour une application dans la vie chrétienne
- A quoi ou à qui suis-je attaché sur cette terre ? Qu’est-ce que je crains par-dessus tout de perdre ? Pourquoi cela me semble-t-il si difficile de penser à l’abandonner ? Comment apprendre à m’en détacher pour suivre Jésus ?
- Jésus nous demande-t-il de vivre en ermite dénué de tout, en vagabond ou SDF, hors de la société, mais finalement à sa charge ? Comment obéir à cet ordre de dépouillement sans tomber dans l’excès sectaire ?
- Jusqu’où va mon désir de vie éternelle ? La recherche du Royaume est-elle une priorité de ma vie ? Comment est-ce que je suis Jésus sur ce chemin : comme le chameau bien chargé, lentement et avec de nombreuses haltes, en caravane ou solitaire, ou bien comme le chameau débâté par son Maître, qui se nourrit au puits (la Parole de Dieu) et dans l’auberge (l’église), pour marcher avec persévérance dans les déserts de la vie, vers l’oasis du Royaume ?
08:00 Publié dans Matthieu | Lien permanent | Commentaires (0)