13/05/2016
Étude n°8, Pierre et le Rocher Mat 16.13-20 (21 05 16)
Étude n°8, Pierre et le Rocher Mat 16.13-20 (21 05 16)
« Et vous, qui dites-vous que je suis ? Simon Pierre répondit : Tu es le Christ, le Fils du Dieu Vivant ! …Tu es Pierre (Petros en grec) et sur cette pierre (petra en grec), Je bâtirai mon Église, lui dit Jésus.»Mat 16.15-16, 18)
(Polyptyque de Montbéliard, 16è, Profession de foi de Pierre)
Observons
Mat 16.13-20 Confession de foi de Pierre
Introduction : Arrivée de Jésus à Césarée de Philippe
1- v 13-14 : Comment le peuple considère-t-il Jésus ? Que signifie cette identité de « fils de l’homme » que Jésus se donne à lui-même ? (voir Dan 7.13)
2- v 15-16 : Quelle est l’opinion des disciples ? Comment Pierre identifie-t-il Jésus ? Qu’est-ce que cela ajoute au titre précédent ?
3- v 17-19 : Commentaire de Jésus :
a) Comment Simon a-t-il pu discerner la nature de Jésus ? Que signifie « la chair et le sang » dans la Bible (1 Cor 15.50 ; Gal 1.16 Eph 6.12 ; Heb 2.14)
b) Quel sens Jésus donne-t-il au nouveau prénom de son disciple ? Que marque pour le disciple ce changement de prénom à ce moment précis ? Qui est fondateur de l’assemblée (= Église) (v 18). Comment le texte de 1 Cor 3.11 permet-il de comprendre la parole de Jésus à Pierre ? De quelle pierre de fondement parle Jésus à ce moment ?
c) A travers Pierre à qui sont confiées les clés du royaume ? En quoi consistent ces clés ? Ce qui délie, et ce qui lie ? Comparer avec
2 Cor 2.15-16 et Jean 20.23.
Conclusion : Pourquoi Jésus recommande-t-il le silence sur sa nature ?
Comprendre
Contexte
Jusqu’à présent Jésus a prononcé des discours et accompli des miracles pour révéler qui il est (ch 4-10). Il a provoqué des réactions différentes chez Jean-Baptiste, la foule et les Pharisiens (ch 11-12). Devant le doute, le scepticisme et les accusations, il se retire, en enseignant par paraboles (ch 13), et il recherche la solitude, il fuit la foule parce qu’elle veut en faire son roi terrestre, mais pourtant il la nourrit (ch 14).Il se réfugie même en territoire païen (ch 15). Enfin des guérisons et une seconde multiplication des pains provoquent l’attaque des Pharisiens et des Saducéens (ch 16.1-12), dont il s’éloigne à Césarée de Philippe, au nord-est du pays.
A partir de la confession de Pierre (16.13-20), il prépare ses disciples à sa mort (16.21-28), et se révèle à eux comme le Fils de Dieu, à la Transfiguration (ch 17), avant de monter à Jérusalem (ch 18-20).
Texte
La confession de Pierre marque donc un tournant dans l’attitude et l’enseignement de Jésus vis-à-vis de ses disciples. La reconnaissance de sa divinité et de sa messianité leur permet de recevoir la révélation de la réelle mission de Jésus (v 22-23), même s’ils ne sont pas encore capables de la comprendre.
1- A l’inverse du peuple et du roi Hérode qui ne voient en Jésus qu’un prophète, dans la lignée des autres et précurseur du Messie libérateur du joug des Romains, les disciples par la bouche de Pierre, confessent que celui qui se nomme lui-même le Fils de l’Homme, ne signifie pas seulement son humble filiation humaine, mais représente bien le personnage de la grande vision eschatologique de Daniel 7.13-14, qui s’avance vers l’Ancien des jours pour recevoir la « domination, l’honneur et la royauté » éternels. Le nom de « Fils de l’homme » que Jésus seul s’attribue, annonce le Messie, avec l’idée de l’abaissement de son humanité qui sera un jour élevée à la gloire (Phi 2.6-11).
2- Pierre et les disciples inspirés par l’Esprit (v 17) voient, au-delà de l’humanité visible de Jésus, sa gloire de Fils de Dieu, ce que confirmera la Transfiguration. Pierre en ajoutant Fils du Dieu « Vivant », l’oppose aux idoles fabriquées par les hommes, et voit Dieu comme la source de toute vie et de celle qui se manifeste en Jésus. Cet élan des disciples brise le moule de la pensée juive, de l’opinion populaire, pour accéder au monde spirituel divin. Car selon l’hébreu, l’expression « fils de… » marque l’identité de nature et de caractère, plus qu’une filiation de sang ! En qualifiant Jésus de « fils de Dieu », Pierre lui accorde pleinement la nature et le caractère de Dieu !
3- Le commentaire de Jésus (v 18-19), très controversé entre catholiques et protestants est à examiner de près, sans y ajouter ce qu’on aimerait y trouver.
Jésus appelle Simon « heureux » d’avoir eu cette révélation de l’Esprit, d’avoir pu percevoir au-delà des apparences humaines et terrestres, la réalité divine invisible, car cette « vue de l’Esprit », cette foi, ouvre à Pierre la source du bonheur présent et éternel.
D’abord, Jésus rappelle à son disciple le nom qu’il lui a donné au début de leur rencontre (Jean 1.42) : Simon Bar Jona (fils de Jona) signifie : celui qui écoute, fils de la colombe, emblème de l’Esprit (Mat 3.16). Le disciple qui a confessé la divinité messianique de Jésus, est celui qui a su écouter la voix de l’Esprit et comprendre sa révélation sur Jésus. Il peut alors être considéré comme un « roc » (Petros chez Matthieu, Céphas chez Jean). Ce nom commun, au féminin pour désigner un élément solide de la nature (= une pierre en français) qui peut rouler, à la différence du rocher, immobile et ancré dans la terre, devient un nom propre au masculin, pour nommer un homme au caractère affirmé, mais sujet à la faiblesse, à l’instabilité. L’idée sous-jacente de ce jeu de mot est la même : la foi dans le Christ rend le disciple plein d’assurance et de fermeté dans sa confession. Mais Jésus connaît parfaitement le caractère de son disciple : il le sait à la fois fragile comme la « pierre qui roule » (petra), et solide comme le roc. Dans sa fragilité, il se fera un instant plus tard (v 22) la voix du tentateur, et le reniera à la croix ; mais dans la solidité de sa foi, il pourra devenir après la résurrection et la Pentecôte, une des colonnes de l’Église (Gal 2.9).
Jésus voit que Pierre, le premier à le confesser publiquement, sera aussi le premier fondateur de l’Eglise parmi les Juifs (Actes 2), parmi les Samaritains (Ac 8.14 et suivants), et parmi les païens (Ac 10). Dans toutes les listes des apôtres, il est nommé en premier (Mt 10.2 ; Mc 3.16 ; Lc 6.14 ; Ac 1.13). Mais cette primauté historique ne lui confère pas un rang supérieur transmissible dans le temps. Il fut le premier fondateur, sans être le fondement (1 Co 3.11) ou la pierre angulaire (1Pi 2.6), le Rocher (1 Sam 2.2 ; 1 Cor 10.4) que seul Christ est. D’autres apôtres (Paul ou Jean) furent plus grands que lui et jamais Pierre n’eut de suprématie dans le gouvernement de l’Église (Ac 11 et 15 ; Ga 2). Marc et Luc ne rapportent pas les remarques de Jésus à cette confession de Pierre, signe que les prérogatives accordées à Pierre n’étaient pas considérées comme primordiales ni éternelles.
La confession de la foi en la messianité divine de Jésus permet aux disciples de s’assembler en Eglise (= assemblée convoquée) dont Christ est le fondement (1Cor 3.11) et la raison d’être. C’est lui seul qui « bâtit » (v 18 Je bâtirai…) une communauté spirituelle de fidèles que la mort spirituelle (= la séparation d’avec Dieu) n’atteindra ni n’engloutira pas (v 18) car Il sera toujours avec eux (Mat 28.20).
À travers son disciple, Jésus donne à l’Église sa mission :
« Lier » les hommes à Dieu (Dt 6.8 ; 11.18 ; Hé 8.10), en les invitant à entrer dans son alliance de vie (Mal 2.5 ; Rm 11.27), et les « délier » de leur péché et de leur culpabilité (Luc 13.16 ; Jn 11.44), en leur annonçant le pardon que Dieu leur offre en son Fils Jésus (v 19).
La recommandation sévère de Jésus de ne pas révéler qu’il est le Christ avant l’heure, a pour but de ne pas exciter dans le peuple de fausses espérances messianiques, charnelles et terrestres, ni de provoquer trot tôt la haine de ses adversaires. Jésus déclarera lui-même qui il est, à l’heure du martyre (Mt 26.63, 64).
Questions pour une application dans la vie chrétienne
- Qui est Jésus pour moi ? Un homme extraordinaire, plein d’amour, qui est donné en exemple, celui en qui Dieu s’est incarné et par lequel Il a manifesté son amour et sa volonté de me sauver (Jn 3.16), ou encore celui qui me juge (Mt 16.27) ? le rocher sur lequel je peux m’appuyer et me reposer ? Qu’est-ce que ma vision de Jésus change dans ma vie ?
- Suis-je lié à Christ et délié de ma culpabilité ? Comment l’Église me permet-elle de le vivre concrètement ?
- Comment puis-je contribuer à lier à Dieu ceux qui m’entourent, et à les délier de leur culpabilité consciente ou inconsciente ?
08:00 Publié dans Matthieu | Lien permanent | Commentaires (1)
06/05/2016
Étude n°7 Seigneur des Juifs et des Gentils, Mat 15.21-28 (14 05 16)
Étude n°7 Seigneur des Juifs et des Gentils, Mat 15.21-28 (14 05 16)
Moi, l’Éternel, je t’ai appelé pour la justice et je te prends par la main, je te protège et je t’établis pour faire alliance avec le peuple, pour être la lumière des nations… » Es 42.6
(Jésus et la Cananéenne, Drouais , 18ès)
Observons
- D'où part Jésus et où se rend-il ?
- Qui rencontre-t-il ? D'où vient-elle ? Comment l'appelle-t-elle ? Quelle est sa requête ?
- Comment réagit Jésus ? Que lui demandent ses disciples ? Quel double sens a le verbe employé par les disciples ?
- Quelle forme ont les phrases des deux premières réponses de Jésus ?
- Comment Jésus définit-il sa mission ?
- Comment la femme insiste-t-elle ?
- Que signifie l'image employée par Jésus pour lui répondre ?
- Quelle est l'attitude de la femme devant ces propos ?
- Qu'admire Jésus chez elle ? Comment l'exauce-t-il ?
Comprenons
Un texte où l’attitude de Jésus paraît dure. Est-ce de la pédagogie, ou Jésus a-t-il besoin de se laisser convaincre par la femme ?
Un face à face en territoire païen
Jésus quitte la Galilée pour la région de Tyr et de Sidon. L’association des deux noms de ville ne donne pas l’indication géographique précise, mais indique un territoire païen, sans doute la Phénicie. La femme qui interpelle Jésus est cananéenne, donc païenne. Le fait que sa fille soit tourmentée par un démon la situe encore davantage du côté de "l’impureté", comme le pensaient les Juifs au sujet de tous les païens (= les Gentils), et de tous les « fous » appelés démoniaques.
Une sortie du cadre pour chacun des personnages
Curieusement le texte commence par deux sorties : celle de Jésus d’abord, qui « sort de là » (= Israël, la Galilée), puis celle de la cananéenne qui « sort de ces contrées» (le verbe est traduit à tort par « vient »). Le départ de Jésus apparaît comme une pause, un temps de vacances, de repos, qui rompt avec le rythme soutenu des récits précédents, où il était suivi par les foules et assailli de questions pièges par les Pharisiens. Lui le Juif, il ose choisir, pour souffler un peu, un territoire païen où il espère rester incognito.
La femme païenne ose sortir de son cadre païen pour appeler au secours un homme juif, qu’elle reconnaît comme Messie, Sauveur, Fils de David donc de lignée royale. Elle sort donc de son territoire culturel, social et religieux.
Tous les deux sont sortis hors de leur milieu naturel, pour offrir une possibilité de rencontre avec l’autre. Pour se rencontrer ne faut-il pas sortir de soi, de ses habitudes, de ses préjugés ? Mais il faut du temps pour se rencontrer en dehors de soi. C’est ce que peut aussi enseigner ce récit.
Un dialogue à sens unique ?
Mt 15.22 : la femme commence par assaillir Jésus de supplications, en le reconnaissant comme Seigneur, Fils de David, qui sont des titres messianiques. Est-ce de la foi ou un simple savoir sur quelqu’un dont elle n’attend qu’un geste ponctuel de guérison pour sa fille ? (Icône, guérison de la fille de la Cananéenne)
V 23-26 : A cette femme qui se prosterne devant lui et qui l’appelle à l’aide, Jésus ne répond que par le silence, puis par deux phrases impersonnelles qui commencent chacune par une négation, et s’adressent surtout à lui-même et aux disciples : elles rappellent avec force la place première d’Israël dans sa mission, telle qu’il l’avait comprise jusque-là. Jésus en tant qu’homme avait à affiner sa compréhension de sa mission. Sa rencontre avec la cananéenne va lui en donner l’occasion.
Les disciples ont un comportement équivoque, ambigu. Cherchent-ils à la « renvoyer » ou à la « délivrer » ? (le verbe employé peut avoir les deux sens). Les disciples dans un sens comme dans l’autre, le renvoi ou la guérison, désireraient être débarrassés au plus vite de cette femme païenne et impure qui les dérange. C’est pourquoi Jésus ne peut pas accéder à leur demande ni à celle de la cananéenne, le dialogue doit se poursuivre pour que chacun comprenne qui il est : un guérisseur juif, le Messie des Juifs, ou le Sauveur de l’humanité toute entière ?
Les miettes de l’abondance
V 27 : la femme rebondit sur l’image du pain et des chiens utilisée par Jésus, en interrompant la suite des négations par une affirmation : « Oui, Seigneur ». Elle témoigne ainsi de sa capacité à entrer dans le raisonnement de Jésus, et de son désir d’entrer dans le monde du salut où la surabondance de la nourriture spirituelle rejaillit sur les plus humbles. La femme en reconnaissant dans les « enfants » (pour Jésus = les Juifs) des « maîtres », accepte humblement la préséance du peuple juif, mais affirme que les païens peuvent aussi bénéficier du salut sans porter ombrage aux Juifs.
Elle a accompli tout un chemin intérieur : elle n’intercède plus seulement pour une action miraculeuse extérieure à elle (pour sa fille, v 22), mais elle demande du secours pour elle (v 25) et reconnaît en Jésus celui qui donne la nourriture de vie, dont même une miette peut faire vivre (v 27).
Jésus aussi a parcouru un chemin : il s’émerveille de la foi de cette femme cananéenne, en contraste avec les préjugés (v24,26) et l’incrédulité de son peuple (v 12-20). Il entre alors en contact direct avec elle (v 28), en admirant sa foi et en affirmant la guérison de sa fille. C’est la foi, exprimée par la prière et la recherche de salut, qui permet l’intervention divine, et non l’envie du prodige ou le désir d’être débarrassé d’un problème gênant.
Jésus est amené par la cananéenne et le centenier (Mt 8.5-13) à affirmer sa mission universelle : si le salut vient des Juifs, il est offert à tous, juifs et païens, qui le désirent d’un cœur humble et sincère.
Audace, humilité, écoute de la Parole, persévérance et confiance totale dans la puissance de Dieu, tels sont les enseignements de cette femme pour la croissance de notre foi.
Questions pour une application dans la vie chrétienne
- Par quoi est motivé notre désir de rencontrer Jésus ? Une simple curiosité, un souhait personnel de miracle, un besoin de nourriture solide pour notre vie, la conscience de notre faiblesse, l’aspiration à un changement de vie et d’état, la nécessité et le désir de grandir dans la foi ?
- De quoi avons-nous besoin de « sortir » pour rencontrer Christ, ou notre prochain ? Quelles exclusions freinent notre témoignage à « toutes les nations » ? Comment imiter l'ouverture aux autres de Jésus dans nos contacts avec les Juifs, les Musulmans, les Orientaux bouddhistes et hindous ou même les agnostiques ?
- Quelles miettes de notre abondance spirituelle offrons-nous aux autres ?
08:00 Publié dans Matthieu | Lien permanent | Commentaires (0)